
Le Tonnerre de Dieu est un film de dialogues, plus que de mise en scène, où Jean Gabin vieillissant, qui n’avait rien perdu de sa verve, interprète le rôle d’un vétérinaire à la retraire, alternant entre sa vie à la campagne dans un somptueux manoir, entouré de ses chiens et de sa femme, et les bars, où il rencontre une prostituée, Simone, qu’il décide de prendre sous son aile.
Les répliques, et les piques entre les personnages, sont d’autant plus acérées que le protagoniste est la plupart du temps enivré par le vin bu comme de l’eau, voire complètement gris. Elles font sourire, parfois rire. Gabin se glisse dans la peau d’un Brassac qui ne sort pas de ce que le public attend de lui : un personnage bougon, presque misanthrope, qui cache bien sûr un cœur tendre. Les dialogues, qui font penser à la patte d’Audiard, ne semblent avoir été composés que pour lui seul.
La relation entre les personnages, et surtout entre Brassac, sauveur et protecteur, et Simone, petit oiseau esseulé, s’apparente à celle que le vétérinaire entretient avec ses animaux : quelque chose de l’ordre du soin, du rapatriement chez lui, d’une collection. Sauf que cette fois, la bête parle, possède des émotions, et s’éloigne progressivement de son maître pour aller voir ailleurs. On retiendra tout de même une scène grandiose, un soir d’orage, où les chevaux s’affolent dans l’écurie, et alertent Simone, qui rencontrera en son voisin, à qui elle demande de l’aide, son futur époux. Il y a la violence de la tempête et cette lumière intense déferlant du ciel, la pluie qui ne cesse de battre, un fouet utilisé pour calmer les animaux, et bientôt, dans le calme revenu, deux personnages qui font l’amour sur la paille, comme si l’ardeur de l’intempérie réveillait en eux un besoin bestial.
Le titre ne possède d’écho dans le film que par la similitude qui peut s’établir entre l’histoire de Marie Madeleine, elle aussi prostituée, protégée de Jésus, et le passif de Simone. Mais le scénario ne l’exploite que trop peu et manque parfois de structure, carence à laquelle s’ajoute des scènes trop appuyées dramatiquement sur une musique envahissante. Ce sont donc des répliques cultes, qui viennent dorer et pimenter une histoire plutôt convenue, tant sur le dessin des personnages que sur sa trame dramaturgique.
De Denys de la Patellière / Avec Jean Gabin, Michèle Mercier, Robert Hossein / France, Italie, Allemagne de l’Ouest / 1h30 / 1965 / Festival Lumière 2023.