
Jour et nuit, il est assis au même endroit, au fond d’un bar nommé « The Place ». Tour à tour, différentes personnes s’entretiennent avec lui. Cet homme mystérieux, au physique ordinaire et charismatique, propose des pactes faustiens à ses clients. Il réalise leurs vœux en exigeant une contrepartie : une religieuse qui a perdu la foi doit tomber enceinte pour la retrouver, un homme qui veut sauver la vie d’un enfant doit tuer une petite fille, une dame doit poser une bombe dans un lieu public pour que son mari guérisse de sa maladie d’Alzheimer…
Il faut se réjouir de la sortie dans les salles françaises de The Place, le onzième long-métrage de Paolo Genovese, auteur relativement inconnu en France alors qu’il fait les beaux jours du box-office italien (son précédent film, Perfetti Sconosciuti, a donné lieu à un remake de Fred Cavayé sorti l’année dernière sous le titre Le Jeu). Adepte du huis-clos basé sur un angle concept, le réalisateur s’est ici inspiré d’une série télévisée américaine, The Booth at the End (2010). À mesure que les gens défilent devant cet étrange personnage, à la fois allégorie du diable et directeur de conscience ambigu, et que les missions qui leur sont données entrent en collision, différents conflits moraux sont soulevés. Quels sacrifices et quels compromis sommes-nous prêts à faire pour réaliser nos désirs ? Si l’écriture du film parvient à questionner de manière féroce notre liberté d’action, adoptant un parti pris dramaturgique efficace qui théâtralise un hors-champ dans l’esprit du spectateur, elle contient en elle-même ses limites cinématographiques. Les transitions sont très répétitives, et le cinéaste semble hésiter entre deux fins en choisissant la moins jusqu’au boutiste. Il mène finalement un récit trop métaphorique et trop théorique pour parvenir à toucher, malgré son intelligence.
The Place / De Paolo Genovese / Avec Valerio Mastandrea, Marco Giallini, Alba Rohrwacher / Italie / 1h45 / Sortie le 30 janvier 2019.