Hollywood

Disponible sur Netflix

Affiche
© FR_tmdb

Los Angeles, fin des années 1940. Hollywood vit son âge d’or. Jack est jeune et beau ; comme tant d’autres, il a rejoint la ville avec l’espoir de devenir une star de cinéma. Son chemin croise celui d’Ernie, le propriétaire d’une station essence un peu spéciale… De rencontre en rencontre, Jack se lie avec d’autres marginaux attirés comme lui par la lumière de la ville, avec lesquels il pénètre progressivement le monde merveilleux dont il rêve.

Hollywood mériterait un certain nombre de reproches : il est vrai que la série constitue une démonstration d’inclusivité très appuyée, opérée à coup d’esthétique tendance guimauve et de ficelles scénaristiques souvent un peu grosses. Mais c’est justement cette réinvention de l’histoire et du mythe Hollywoodien, de ce qu’il aurait pu être, et de ce qu’il peut encore devenir, qui en constitue la sève. Afro et Asio-Américains, femmes et notamment femmes de plus de quarante ans, homosexuels, bisexuels… si l’on a parfois l’impression que toutes les cases des minorités et des groupes opprimés sont un peu trop consciencieusement cochées pour être mis en avant et défendus par les créateurs, c’est aussi la preuve que leur absence dans les œuvres de fiction nous est encore trop familière. Et si les dialogues sont parfois maladroits, notamment lorsqu’ils se transforment de façon peu naturelle en discours politiques ou en phrases chocs, la leçon de Ryan Murphy est que les vérités qu’ils assènent méritent malheureusement encore d’être entendues. On remarquera d’ailleurs que la série s’amuse à présenter dans son premier épisode un homme blanc et hétérosexuel comme le protagoniste de l’intrigue, pour ensuite le laisser se fondre dans l’éventail de personnages plus diversifiés qui apparaissent progressivement.

Hollywood ne se limite heureusement pas à cet exposé d’ouverture d’esprit. On y retrouve des personnalités culte de l’âge d’or : Rock Hudson est un des héros de l’aventure, Vivien Leigh ou George Cukor font partie des personnages secondaires, et des producteurs de légende comme David O. Selznick ou Louis B. Mayer sont régulièrement cités. La série n’a pas peur du name-dropping, solution facile mais efficace pour contenter les cinéphiles sans perdre les néophytes, l’intrigue reposant essentiellement sur des personnages originaux. Tout son sel vient aussi de la façon dont elle permet de découvrir le fonctionnement du système et du processus de fabrication d’un film de studio, depuis l’agent d’artiste jusqu’au « producteur créatif » – le portrait du redoutable créateur de stars Henry Willson étant probablement un des plus intéressants.

L’hommage tend rapidement à se transformer en prétexte pour imaginer comment, avec le savoir-faire de ses talentueux gestionnaires, artistes et techniciens, et avec leur force de frappe commerciale, les studios auraient pu forger un monde différent.  Car, d’épisode en épisode, la série se prend à rêver. Et si un film écrit par un Afro-Américain, avec une Afro-Américaine dans le rôle principal, était un succès ? Et si Rock Hudson, au lieu de se cacher, avait assumé son homosexualité ? Et si les studios avaient remis en question leur propre logique commerciale pour devenir une force progressiste de promotion de la diversité ? La mise en abîme est loin d’être inintéressante, et son message est malheureusement loin d’avoir perdu son sens. On pensera par exemple au déplorable Captain Marvel sorti l’an dernier, dans lequel la relation lesbienne entre les deux personnages principaux était honteusement sous-entendue, ou plutôt, disons-le, censurée ; si ce ne sont plus les cinémas du sud des États-Unis qui, comme dans la série, auraient refusé de diffuser le film, la logique commerciale qui meut toujours les studios aujourd’hui continue à les pousser à pratiquer l’autocensure, de peur de voir leurs productions refusées dans certains pays.

Est-ce que cette réflexion aurait pu être menée avec un scénario plus rigoureux ? Peut-être pas : ce lâcher-prise, ce sentiment de liberté, de fausse simplicité assumée, avec ses retournements de situation peu crédibles qui pourtant emportent l’adhésion, ses sous-intrigues qui surgissent de nulle part auxquelles on croit tout de même, et ses deus ex machina qui résolvent tout pour notre plus grande satisfaction… autant d’éléments qui participent tous de la construction d’un univers Hollywoodien fantasmé, vécu comme un rêve collectif auquel nous, spectateurs, sommes invités. Hollywood n’est pas une grande œuvre qui marquera l’histoire de la série, mais elle ne cherche pas à l’être. Ce qu’elle propose est un divertissement politique ; et celui-ci a le mérite de mener sa réflexion avec énergie et originalité.

Hollywood / De Ryan Murphy et Ian Brennan / Avec David Corenswet, Darren Criss, Laura Harrier / États-Unis / 7 x 44-57mn / 2020 / Disponible sur Netflix.

2 réflexions sur « Hollywood »

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