
Premier long métrage ambitieux, Le Vourdalak déploie une panoplie de ressorts cinématographiques au service d’un conte mi-horrifique, mi-comique.
Adrien Beau revisite le mythe du vampire pour en faire une relecture de l’amour filial et patriarcal : le grand-père suce la vie de ses enfants et petits enfants pour les garder à jamais auprès de lui. Un postulat scénaristique somme-toute assez banal mais qui donne lieu à une véritable proposition de cinéma. Le réalisateur ne développe finalement pas tant que le propos du film que son imagerie, à l’originalité assez folle.
Chaque personnage est, dans Le Vourdalak, prétexte à une identité visuelle et sonore : Piotr, à la voix angélique, s’habille comme une femme ; Sdenka danse, ornée de chaînes d’argent qui tintent ; le marquis d’Urfé se farde selon les convenances de la cour et rythme ses gestes d’onomatopées. Mais le personnage le plus surprenant est bien celui du Vourdalak : créature grisâtre et décharnée dont la voix n’est autre que celle du réalisateur (lui aussi, comme le père de famille, vampiriserait-il son équipe de comédiens pour aspirer et ainsi nous dévoiler leur âme ?).
Marionnette tour à tour terrifiante et ridicule, le Vourdalak incarne la singularité du projet d’Adrien Beau. Dans ce film tourné en 16mm, il y a quelque chose de l’ordre de l’artifice filmique revendiqué et magnifié. Format, texture, et son sont caractérisés par leur aspect artisanal : du manque de budget vient la nécessité de l’inventivité et Adrien Beau en propose une démonstration réussie. Un film fantastique français comme on en voit peu et une créature de cinéma que nous ne sommes pas prêts d’oublier.
D’Adrien Beau / Avec Kacy Mottet Klein, Ariane Labed, Grégoire Colin et Vassili Schneider / 1h30 / France / Sortie le 25 octobre 2023.