
Il y a le sexe, l’amour et tout ce qu’il y a entre les deux. Slow débute et termine par le sexe, entre les deux : l’amour. Elena est danseuse contemporaine et vit une sexualité décomplexée et fréquente. Dovydas est interprète en langue des signes et asexuel. Marija Kavtaradze filme l’éclosion du sentiment, la cohabitation des désirs et la construction de la relation. L’asexualité n’est jamais obstacle à surmonter ou défaut à gommer. C’est un état de fait avec lequel Elena compose son couple et à partir duquel Marija Kavtaradze choisit de construire son intrigue.
Ce qui frappe dans Slow c’est tout d’abord l’impression de bonheur rayonnant qui se dégage des protagonistes. Ils sont heureux et ils sont bienveillants. Aucune forme de mesquinerie dans l’histoire que nous conte Marija Kavtaradze, ses personnages sont intègres. Et si elle met en scène certaines épreuves que traverse le couple, ces moments sont assurément moins nombreux que ceux d’entente. En éloignant de son sujet le thème de la faute morale ou physique dans le couple, la réalisatrice parvient à se concentrer sur quelque chose de plus fin et de plus filmique. À savoir les liens entre les gestes et la parole. Peut-on les hiérarchiser ou bien les interchanger ? Marija Kavtaradze questionne l’idée selon laquelle le geste serait la matérialisation de la parole, son accomplissement, au sein du couple : je dis que j’aime et je fais l’amour pour le prouver. Mais dans une relation dont la sexualité est absente, il faut trouver d’autres gestes, réinventer le contact physique.
La réalisatrice met alors en scène un ballet de couple. Elle chorégraphie la séduction, le quotidien, la dispute ou la réconciliation ; mettant en rythme les moindres gestes. En témoignent la beauté des scènes de transposition musicale en langue des signes ou bien la poésie d’une séquence de danse en miroir. Avec habileté, Marija Kavtaradze filme également la danse comme on filmerait le sexe : la caméra capte la sueur qui perle sur le corps, les visages extatiques. Il y a l’amour, le sexe et tout ce qu’il y a entre les deux. Dans Slow, ce qu’il y a entre les deux – et au delà – c’est la danse. Tendre ou sensuelle, la danse dans ce qu’elle a de plus orgasmique.
De Marija Kavtaradze / Avec Greta Grineviciute et Kestutis Cicenas / Lituanie / 1h44 / Arras Film Festival 2023.