
Julie s’est faite agresser, mais elle se tait. Même lorsque son entraîneur est suspendu, qu’elle est assurée de ne plus le revoir, elle préfère garder son histoire pour elle. Alors elle s’enferme, avant de peu à peu s’ouvrir aux autres. Julie se tait est le récit de cette lente progression vers la lumière, d’un combat intérieur qui nous sera accessible par bribes.
Voilà un film qui ne prend pas son spectateur par la main. Des violences infligées à Julie, on n’en saura rien ; un simple « lorsque tu me l’as demandé, j’ai arrêté » de son agresseur suffira à les imaginer. Ce dernier nous apparaît d’abord sympathique, avant que l’on constate l’emprise qu’il exerce sur la jeune femme : les encouragements se mêlent aux coups de téléphone incessants, et sa volonté d’isoler Julie de son entourage devient de plus en plus évidente. Puis le personnage disparaît et devient une simple rumeur, un entraîneur anonyme qui aurait une responsabilité dans le suicide d’une jeune prodige. Le film explore de façon assez juste la façon dont les bruits de couloir circulent et prennent de l’ampleur, en parfaite cohérence avec le réalisme cru de sa mise en scène.
Malheureusement, la passionnante étude de personnage qui se dessine sous nos yeux se retrouve amoindrie par un récit quelque peu programmatique. Dans un premier temps, le film se réduit à son titre : Julie se tait, un point c’est tout. Face au discours dominant incitant les victimes à porter plainte malgré la violence du processus, on pourrait légitimement se réjouir de voir un tel portrait de personnage. Néanmoins, le récit effectue un virage à 180 degrés lors d’une séquence où l’on découvre que Julie avait collecté une preuve contre son agresseur dès le premier tiers du film. Il y a là une mécanique scénaristique assez frustrante : le réalisateur, qui insistait jusque-là sur le caractère passif de son personnage, nous cache délibérément un élément crucial de son arc narratif. Mais il est encore plus décevant de voir le récit se terminer sur ce qu’il évitait jusque-là, à savoir une injonction à porter plainte pour protéger les futures sportives qui croiseront le chemin de l’entraîneur.
Julie se tait est le fruit de deux désirs contradictoires : suggérer le combat intérieur d’une victime qui décide de se taire et raconter son émancipation vis-à-vis de son agresseur. Si les deux intentions sont louables, cet assemblage autour du personnage de Julie s’avère terriblement maladroit. Malgré une mise en scène solide et une direction d’acteur remarquable, Leonardo Van Dijl signe un premier long-métrage trop programmatique et empêtré dans son discours pour convaincre.
Julie se tait / De Leonardo Van Dijl / Avec Tessa Van den Broeck, Ruth Becquart, Koen De Bouw / Bélgique, Suède / 1h37 min / Sortie le 29 janvier 2025.