Les meilleurs films de zombie

Avec Peninsula, les zombies sont de retour au cinéma ©ARP Sélection

La sortie de Peninsula, suite du mémorable Dernier train pour Busan (Yeon Sang-ho, 2016), replace les zombies au centre d’une actualité cinématographique qui leur fait de plus en plus de place. Le film de mort-vivant est un genre en renouveau : quatre films sélectionnés au festival de Cannes en 2019 les plaçait au cœur de leur propos. Depuis ses premières apparitions dans le cinéma de série Z (chez Edward Wood notamment) ou d’auteur (Vaudou de Jacques Tourneur, en 1943), le zombie inspire toujours plus de spectacle et de déclinaisons, parfois originales, pour le meilleur et pour le pire. S’il est souvent et pertinemment employé comme une allégorie pour dire les maux d’une société en crise, qu’il nous plonge dans la culture haïtienne ou dans un monde apocalyptique, il matérialise aussi une vision de l’homme qui le renvoie à sa propre décomposition. Mettons à l’honneur les films qui ont su exploiter cette figure en parcourant dix titres emblématiques, parmi ceux qui ont tracé des lignes définitives ou qui ont réussi à prendre d’autres directions.

La Nuit des morts-vivants, de George A. Romero (1968)

Lors d’une visite au cimetière, une jeune femme est attaquée par un homme étrange. Elle s’enfuit et parvient à rejoindre d’autre réfugiés dans une maison rapidement assiégée par des hordes de morts-vivants… Ou comment un petit film fauché, avec sa mise en scène voyante mais efficace tout en axes penchés et gros plans grimaçants, devient le point de départ d’une série de films cultes signés Romero, et surtout d’un genre et de sa mythologie. Référence ultime avec laquelle tous les films de zombie semblent entretenir un lien, que ce soit en s’en inspirant directement (zombies lents, titubants et tenaces) ou au contraire en voulant s’en affranchir (quand il n’est pas lent, le zombie est souvent d’une rapidité extrême). Son final transforme le petit spectacle d’horreur en virulente charge politique contre l’Amérique des armes et du racisme, et pose ainsi une règle essentielle du bon film de zombie : ne pas être qu’une histoire de monstre. – Ivan Leric

Zombie, de George A. Romero (1978)

Adoubé par Dario Argento (qui a officié comme consultant à l’écriture et a cosigné la bande-originale avec ses amis de Goblin), Zombie impressionne par sa narration brillante, son climat anxiogène, ses acteurs à « gueules » et son discours politique au vitriol, hélas toujours très actuel. Si le premier volet esquissait les grandes lignes du motif des morts-vivants au cinéma, c’est bien Zombie qui entérine la modernité de ce concept, préfigurant déjà les décors exigus et étouffants du jeu vidéo Resident Evil et l’atmosphère putride des comic books de Robert Kirkman. Devant la caméra de Romero, le zombie errant dans les couloirs d’un centre commercial gigantesque devient le symptôme parfait de l’hypercapitalisme, mû seulement par les restes de son instinct de consommateur. Zombie est un chef-d’œuvre horrifique et engagé indétrônable qu’on vous conseille de découvrir dans sa version américaine, nettement plus longue, pour prolonger le plaisir. – Alexis Roux

Zombie de Romero, un chef-d’œuvre du genre © Laurel group

L’Enfer des zombies, de Lucio Fulci (1979)

Un bateau vide est entré dans le port de New York, avec à son bord un zombie… La fille du propriétaire décide d’en savoir plus, accompagnée par un journaliste enquêteur. Les premières séquences urbaines sont une fausse piste : les protagonistes quittent rapidement la ville pour rejoindre une île lointaine, d’où venait le bateau. Là-bas, ils découvrent un endroit infesté de morts-vivants… En se situant sous les tropiques, ce film signé Lucio Fulci renoue avec les origines du mythe zombie (le vaudou) tout en ayant intégré les codes mis en place par Romero. Huis clos à ciel ouvert, rythmé par une mémorable partition que n’aurait pas renié John Carpenter, L’Enfer des zombies fait une place au soleil aux morts-vivants, sans que le lieu ne soit qu’un arrière-plan fonctionnel : les zombies qui se réveillent rappellent le passé d’un conflit entre esclaves et conquistadors. Ils sont la réouverture des blessures enfouies sous une terre meurtrie. – Victorien Daoût

La Nuit des morts-vivants, de Tom Savini (1990)

Pourtant réalisé pour des raisons pécuniaires (le film original est tombé par accident dans le domaine public, privant Romero et son équipe de leurs droits d’auteurs), La Nuit des morts-vivants version Savini n’a rien d’un produit de commande mercantile. Réalisé par celui qui fut le maquilleur génial de Romero et réécrit par le maître lui-même, le film prolonge les thématiques de son illustre aîné et comble ses quelques manquements (imputables à son budget très restreint). Survival anxiogène et paranoïaque, le film réactualise une vision noire des hommes et prolonge le caractère contestataire de l’original. Plus la nuit bascule dans l’horreur gore, plus la frontière entre l’humain et le zombie devient poreuse. Un must-see trop souvent oublié et qui n’a pas pris une ride. – A. R.

Un remake à redécouvrir ©D.R.

Braindead, de Peter Jackson (1992)

Avant de réaliser la trilogie Le Seigneur des anneaux (2001-2003), le Néo-zélandais Peter Jackson faisait les beaux jours du cinéma gore. Braindead est une parodie du genre qui pousse très loin le curseur de l’outrance. Le point de départ est simple, son développement est grand-guignolesque : une femme se fait mordre par un singe-rat de Sumatra dans un zoo, et la voilà transformée en zombie. Son fils va devoir gérer sa monstrueuse métamorphose, et celle d’autres proches bientôt contaminés. En les enfermant dans sa cave, il ne fait que contenir le débordement annoncé… Le zombie devient ici une simple matière à broyer, vivante et dégoûtante, dont l’anéantissement ludique culmine dans un final avec une tondeuse à gazon. Des viscères s’entortillent et se meuvent de manière autonome, des bras et des jambes sont coupés comme du beurre, des têtes éclatent et répandent des marées de sang (3000 litres de fausse hémoglobine ont été utilisés)… La figure du zombie aura rarement été aussi repoussante. – V. D.

28 jours plus tard, de Danny Boyle (2002)

28 jours plus tard ou le film de zombie des années 2000. Avec ses caméras portées et son apparence de reportage grésillant (tourné en caméra DV), le film de Danny Boyle répond aux standards trash du genre. Ses plans sont courts et ses angles tortueux. C’est dans ce Londres post-apocalyptique et salissant qu’un jeune Cillian Murphy se bat pour sa survie. Derrière cette esthétique low-budget et parfois un peu superficielle, Boyle s’assure, comme il sait si bien le faire, d’assez de ressorts dramatico-narratifs pour que le film reste d’une intensité finalement plutôt efficace. Malgré un accueil critique mitigé, 28 jours plus tard et son rythme effréné offriront au genre un vrai regain d’énergie. – Chloé Caye

Quand le style de Danny Boyle rencontre le film de mort-vivants ©UFD distribution

Shaun of the dead, d’Edgar Wright (2004)

Les parodies véritablement originales de films de zombies se font rares. Avant de réussir à détourner les codes, il faut savoir s’en imprégner complètement. Edgar Wright n’a pas de quoi s’en faire : inconditionnel du genre, son film Shaun of the Dead est autant parodie qu’il est hommage. En citant tous les grands cinéastes du genre, Wright parvient à mettre en place une intrigue qui ne ressemble à aucune autre, entre humour visuel et verve britannique. Plébiscité par nuls autres que Stephen King ou Quentin Tarantino, ce qui s’annonçait comme une création entre amis à destination d’un public de niche devient un passage obligé pour tous les amoureux du film de mort-vivant, et une comédie toute aussi hilarante pour les moins renseignés. – C. C.

Dernier train pour Busan, de Sang-Ho Yeon (2016)

Un homme et sa fille montent à bord d’un train ; au moment où celui-ci démarre, les passagers découvrent avec horreur qu’au dehors une épidémie est en train de se répandre… et qu’une infectée est montée à bord avec eux. À l’extérieur, le grand spectacle, ses hordes d’ennemis, masse informe et infinie ; dans le train lui-même, les faux-semblants et les imprévisibles réactions humaines, qui s’avèrent tout aussi dangereux. Le film est ainsi structuré par un double mouvement vers l’avant (à travers le pays et au sein du train) qui est pour beaucoup dans le dynamisme exceptionnel de Dernier train pour Busan. Du très grand divertissement, où tous les effets sont parfaitement ménagés, et auquel vient s’ajouter très à propos une touche d’anticapitalisme pour rehausser la saveur de l’ensemble. – I. L.

©ARP Sélection

La Nuit a dévoré le monde, de Dominique Rocher (2018)

Après une soirée arrosée, Sam se réveille seul dans un appartement parisien. Personne d’autre que lui n’est vivant. Personne, ou presque : des zombies infestent les rues et l’empêchent de mettre le nez dehors. Film de mort-vivant qui fait expérimenter à son héros la solitude du citadin, La nuit a dévoré le monde est l’une de belles surprises du cinéma horrifique français de ces dernières années. À l’instar de Dans la brume (Daniel Roby, 2018), co-écrit par le même scénariste Guillaume Lemans, il pose les règles du « film de genre haussmanien », dans lequel un personnage devrait faire face à un phénomène étranger, en pleine capitale. Dominique Rocher impose son univers avec des contours affirmés, et ménage en prime une géniale apparition : Denis Lavant, zombie coincé dans un ascenseur, comme une variation du personnage sorti des égouts qu’il incarnait dans le court-métrage Merde (2008) de Leos Carax. – V. D.

Des zombies dans Paris ©Laurent Champoussin

Atlantique, de Mati Diop (2019)

Ada vit à Dakar. Sur le point de se résoudre à un mariage arrangé après le départ de son seul vrai amour, un jeune ouvrier parti pour l’Europe, de mystérieux phénomènes surviennent qui la conduisent à remettre ses choix en question. Mati Diop s’empare de la figure du zombie pour en faire une métaphore aussi poétique que politique. Ce ne sont plus de la terre, mais de l’océan que surgissent les morts-vivants, cherchant la vengeance contre ceux qui les ont exploités autant que le pardon de celles qu’ils ont abandonnés. Quoi de mieux qu’un zombie pour interroger le rapport des vivants aux morts ? Atlantique apporte une belle preuve que le cinéma d’auteur peut, lui aussi, se nourrir de cette mythologie. – I. L.

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