
Une femme (Mélanie Laurent) se réveille dans une unité cryogénique sans aucune possibilité d’en sortir. Est-elle malade, victime d’une expérience scientifique, prisonnière de son plein gré ? Elle l’ignore et se trouve d’autant plus isolée qu’elle a oublié son identité. Deux objectifs conduisent alors en même temps le suspense: déceler les raisons de son enfermement à travers la reconstitution du puzzle de son vécu, et trouver une solution pour s’en sortir alors que la réserve d’oxygène décroît à grande vitesse…
La pandémie mondiale à ceci de bénéfique auprès des œuvres de science-fiction qu’elle les rapproche de notre expérience commune de la crise sanitaire, même si ce n’était pas leur première intention. Oxygène est à ce titre exemplaire : l’héroïne vit un confinement poussé à l’extrême, tandis que plane une raison plus globale à sa solitude. La réussite de ce huis clos ne vient cependant pas que de la simple métaphore du confinement, mais de la maîtrise d’un récit savamment rythmé, qui tire les thèmes de l’exiguïté et de l’amnésie vers le vertige existentiel plutôt que la recherche de la tension pure. L’héroïne l’expérimente en avançant en même temps que le spectateur. Elle est d’abord un numéro avant d’avoir un nom, un prototype avant d’être une identité, et comme les souris que l’on voit se perdre dans des labyrinthes démesurés, elle devient un pion dans un jeu qui la dépasse.
Contrairement au Danny Boyle de 127 heures (2010), Alexandre Aja (La Colline a des yeux) a compris qu’il fallait être sobre pour faire un huis clos avec un seul personnage, en utilisant avec parcimonie les différentes valeurs de plan et les éléments extérieurs (un bras mécanique avec une seringue, des images d’ordinateur). Mélanie Laurent occupe tout l’espace et l’intensité n’est due qu’à son expressivité, qui contrebalance la froideur du décor. Elle porte le film sur ses épaules bien qu’elle ne soit pas totalement seule : des voix lui répondent (dont celle d’une intelligence artificielle calme et neutre jouée par Mathieu Amalric), et on repense aux conversations téléphoniques de The Guilty (Gustav Möller, 2018), qui donnaient vie à un hors-champ sonore aussi important que ce qui se déroulait à l’écran. Oxygène n’atteint pas la virtuosité d’une telle construction mentale, mais s’avère aussi efficace que le thriller danois lors des retournements dramatiques qui ponctuent au bon moment la plongée claustrophobe. La bonne tenue de la mise en scène de ce brillant scénario ne fait que regretter le choix des derniers plans, qui correspondent à l’insupportable manie de ne pas oser s’arrêter avant l’explicitation de ce qui avait été clairement suggéré, avec plus de subtilité, quelques minutes plus tôt…
Oxygène / D’Alexandre Aja / Avec Mélanie Laurent, Malik Zidi / Etats-Unis – France / 1h40 / Sortie le 12 mai 2021 sur Netflix.
Ah oui, cette fin est indigne du reste!
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