
Judith (Virginie Efira) mène deux vies bien rangées. L’une avec un chef d’orchestre français et deux garçons, l’autre avec un compagnon qui habite Genève avec une fille. Son métier de traductrice lui permet de prétexter des déplacements réguliers en évitant de créer le soupçon… Mais combien de temps pourra-t-elle poursuivre cette existence dédoublée ?
Le motif de la double vie a beau avoir été déjà approfondi aussi bien par le cinéma que par la littérature, Antoine Barraud le renouvelle avec brio en dispensant un étrange sentiment de malaise et d’incompréhension progressivement levée. L’habile construction scénaristique assure l’intérêt de bout en bout : dès la scène inaugurale qui prendra plus tard tout son sens, ce sont des marches qui s’additionnent pour donner des indices et démêler la situation de Judith, présente dans tous les plans de ses deux dimensions. Il s’agit moins d’une spirale à l’intérieur de laquelle elle est aspirée qu’un édifice construit par l’héroïne elle-même mais dont les cloisons deviennent peu à peu friables, menaçant de devenir transparentes tandis que son mystère, à elle, s’épaissit et que sa personnalité semble toujours se dérober.
Le puzzle du récit est avant tout un puzzle identitaire. Virginie Efira impressionne lorsque son visage raconte la fragmentation que son personnage a imposé à sa vie, l’esprit ailleurs et le corps dans une impasse, jouant la femme qu’elle doit être dans chacune de ses familles, et ne jouant pas son sentiment de maternité plus fort que son désir de conjugalité. Face à l’impossibilité de construire quelque chose de fixe, intervient alors une nécessité de s’échapper. Un besoin que l’on éprouve comme Judith (Margot, ou Madeleine ?) au cours d’une scène centrale, lors d’une visite de ses parents à son compagnon suisse, dans laquelle on perd nos repères pour enfin parvenir à rassembler nos esprits, et ressentir un vertige existentiel.
Madeleine Collins / D’Antoine Barraud / Avec Virginie Efira, Quim Gutiérrez, Bruno Salomone, Jacqueline Bisset / France / 1h47 / Sortie le 22 décembre 2021.
Un film qui cherche à marcher sur les traces d’Alfred Hitchcock mais qui est loin d’atteindre la qualité cinématographique de ce dernier.
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