
En 2010, l’historien du cinéma et maintenant lui-même cinéaste Jean-Baptiste Thoret rencontrait Michael Cimino aux États-Unis, et entamait avec lui un road-trip à travers le pays, meilleur moyen selon le réalisateur d’évoquer ses films : au contact du territoire, ses paysages somptueux, ses routes interminables. De cette rencontre était né un livre, Michael Cimino, les voix perdues de l’Amérique. Environ dix ans plus tard, Michael Cimino, un mirage américain donne une seconde vie aux enregistrement issus de ces entretiens, et prolonge par le documentaire la réflexion entamée dans l’ouvrage, dans un très beau film qui délaisse l’analyse pure au profit du ressenti, du témoignage, et du souvenir.
Au cœur de ce mirage américain, la petite ville de Mingo Junction, aujourd’hui en déréliction, où ont été tournées les première et troisième séquences de Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter, 1978), sans doute le film le plus culte du mythique réalisateur américain et œuvre cinématographique majeure sur la guerre du Vietnam. Les habitants du coin ne sont pas particulièrement cinéphiles, mais tous ceux qui étaient là se souviennent du tournage ; un moment unique dans leur vie, où ils ont eu l’impression qu’on s’intéressait à eux, à leurs ouvriers, à leur usine sidérurgique – qui depuis a évidemment fermé.
Chacun raconte son Cimino, son Deer Hunter ; les interventions de Quentin Tarentino ou Oliver Stone ne sont pas plus mises en valeur que celles des habitants de Mingo Junction. Lorsque des extraits des œuvres sont diffusés, ils le sont par bribes, sous forme de fragments visuels projetés sur des bâtiments – choix justifié par la volonté de montrer les films non pas tels qu’ils sont, mais tels qu’on se les remémore, flous, partiels, subjectifs.
Autant de choix particulièrement judicieux permettant de comprendre ce mirage américain qu’était Michael Cimino par une approche aussi sensible qu’originale, et qui donne, bien entendu, l’envie de se (re)plonger dans la filmographie de cet immense cinéaste.
Michael Cimino, un mirage américain / De Jean-Baptiste Thoret / Avec John Savage, Tommy Fitzgerald, James Toback, Quentin Tarentino, Oliver Stone / France / Sortie le 19 janvier 2022
J’aime beaucoup le regard de Thoret sur l’oeuvre de ces cinéastes du Nouvel Hollywood. J’avais lu le livre sur Cimino. Je suis curieux de voir le film désormais.
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