The Housewife

Au cinéma le 9 mars 2022

© Art House

Toko, femme au foyer, est une épouse réservée et obéissante. Son mari la délaisse et lui délègue la responsabilité de leur fille. Lorsque Toko tombe par hasard sur un ancien amant, qui l’incite à reprendre son métier d’architecte, tout son mode de vie se voit remis en question.

Quand est-il justifié que la première scène d’un film soit un flash-forward ? Le procédé, qui permet de créer du suspense sans grands efforts, est tentant, donc fréquemment utilisé. Comment Toko se retrouvera-t-elle ainsi en larmes, dans une cabine téléphonique, au bord d’une route enneigée ? Encore faut-il que la réponse soit intéressante, ce qui n’est hélas pas le cas de cette banale intrigue amoureuse alignant les procédés formels creux et répétitifs sans parvenir à donner corps à son récit. La neige qui tombe infiniment à gros flocon, les interminables routes nocturnes aux lampadaires orangés, et la répétition des mêmes effets sonores et visuels outranciers (chaque fois que Toko ressent une émotion forte, les sons d’ambiance et la musique s’interrompent brutalement tandis que l’image passe au ralenti) n’empêchent pas l’ennui de s’installer.

Yukiko Mishima, la réalisatrice, a pourtant un propos et des idées. Toko, prisonnière des carcans que lui impose le schéma familial traditionnel japonais, souffre de son aliénation. Son mari reçoit ses faveurs sexuelles sans lui rendre la pareille, on la congédie aussi rapidement qu’on l’invite aux fêtes d’entreprise, elle est soumise aux décisions de sa belle-mère… On aurait aimé que le film aille jusqu’au bout de sa dénonciation du patriarcat, car Toko s’avère incapable de reprendre sa liberté par elle-même : il lui faut un collègue qui la conseille, un amant qui la séduise – bref, un homme, pour parvenir à enfin s’émanciper. Peut-être aurait-on pardonné au film cette incohérence idéologique s’il parvenait à susciter plus d’émotion : mais la mièvrerie de la romance de Toko avec son amant mutique, mystérieux et cancéreux (de ces trois encombrantes caractéristiques, peut-être aurait-il fallu choisir…), laisse de marbre.

Reste un dénouement courageux, et probablement scandaleux pour la société nippone : Toko s’enfuit, une mère abandonne sa famille, un individu se détache du groupe. Une dynamique intéressante en soi, mais qui aurait gagné à être appuyée par un tableau bien plus riche du foyer, et surtout de la relation entre la Toko et sa fille. En plus de deux heures de films, The Housewife en avait le temps. Hélas, le film fait le choix de se complaire dans son esthétique et son pseudo-mystère, plutôt que de développer ses personnages.

The Housewife / De Yukiko Mishima / avec Kaho, Tasuku Emoto, Shôtarô Mamiya / Japon / 2h03 / Sortie le 9 mars 2022.

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