Incroyable Mais Vrai

Au cinéma le 15 juin 2022

© Diaphana distribution

Quentin Dupieux est de retour avec un film cette fois-ci plus conforme à son trait habituel. Moins comédie populaire que Mandibules, pas aussi méta que Réalité, Incroyable Mais Vrai est une curiosité pas si inattendue.

Dupieux aurait-il trouvé sa formule ? Sa patte, on la connaît, une image solaire et des décors périurbains tirant tous deux vers un américanisme décalé, mais aussi et surtout un art de manier l’absurde, le “non-sens”, comme il le désigne lui-même. Ce quelque chose qui vient faire travailler notre instinct logique, qui vient jouer avec notre propension à toujours vouloir trouver une cohérence. Dès ses premiers films (même courts) se faisait sentir cette exploration des possibilités amenées par l’auto-réflexion filmique et par des récits affranchis de toutes règles narratives. Son point culminant étant Réalité, une exploration du rêve de la classe moyenne, avec cette propension à faire rire du malaise ressenti face à l’incompréhension, qui se transformait en une sorte de malaise existentiel.

Si la formule paraît être reconduite, Alain Chabat travailleur moyen, en conflit avec femme et patron, c’est pour un tout autre résultat. Le film démarre fort, Dupieux démontre qu’il manie toujours avec aisance le malaise du spectateur face à l’inconnu. L’inconnu, c’est ici le suspens créé par effet d’annonce, qui croît à mesure que l’on se prépare à abandonner toutes conceptions logiques, que l’on rit nerveusement à chaque dialogue qui nous rapproche de l’objet du suspens… Puis sa solution tombe, et c’est là que le bémol apparaît, l’objet du suspens enfin révélé, ses effets, prévisibles, annoncés, il ne reste plus qu’à attendre de tout voir se dénouer. Or c’est bien là l’inverse des sensations originelles transmises par le film, et par les films de Dupieux en général, la prévisibilité ne peut en être une caractéristique, le sens l’aurait-t-il donc emporté ? Le problème se situe davantage du côté du genre, la comédie a fini par prendre le pas sur le reste, et même si elle sert une satire du corps plutôt bien amenée, même si parfois potache, la clarté induite par des situations comiques classiques se marie mal avec l’art du non-sens. 

Quentin Dupieux est pourtant un auteur de comédies, oui mais de comédies bien particulières, qui rient du désarroi irrationnel de ses protagonistes, comme de ses spectateurs, perdus face à l’insensé, qui rient d’une peur existentielle. Ici ce rire se mêle bien vite à un comique de situation qui rassure, nous attend, bref noie l’absurde par sa nécessité d’une logique du gag. Le film reste drôle et efficace, mais manque de ce petit quelque chose qui faisait résonner notre vide intérieur. 

Incroyable mais vrai / De Quentin Dupieux / Avec Alain Chabat, Léa Drucker, Anaïs Demoustier et Benoît Magimel / France / 1h14 / Sortie le 15 juin 2022.

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