
La 11ème édition du Champs-Elysées Film Festival s’est déroulée la semaine dernière. De nombreux spectateurs ont écumé l’avenue parisienne : du cinéma Publicis, au Balzac, en passant par le Lincoln, pour finir au Gaumont Champs-Elysées.
Cette année, le studio indépendant américain A24 et l’un des réalisateurs auquel il doit ses plus grands succès sont mis à l’honneur. Ensemble, Ari Aster et A24 donnent naissance à Hérédité en 2018, puis Midsommar, l’année suivante. L’œuvre du jeune cinéaste s’inscrit avec aisance dans le projet du studio : produire des films de genre qui, ne niant jamais leurs influences, parviennent souvent à s’en émanciper avec succès. Devenant donc l’une des figures de proue du jeune cinéma d’horreur, Ari Aster, a réjouit le public avec une masterclass, une carte blanche et quelques apéritifs sur le superbe rooftop Publicis.
Mais il n’y avait pas que le poulain A24 pour les foules sur les Champs-Elysées cette année. Car le festival proposait également deux futures sorties A24 – très attendues – en avant-premières exclusives : After Yang pour une ouverture délicate et Everything Everywhere All at once pour une clôture déjantée.

La science fiction, dans toutes ses variations et sous toutes ses formes fut effectivement mot d’ordre de ces deux projections. Le film de Kogonada explore l’idée des robots (appelés « technosapiens ») comme possible vecteur sde culture, de tradition mais surtout comme des être dotés d’une grande sensibilité. Tandis que le film de Daniel Kwan et Daniel Scheinert nous met face aux possibilités les plus farfelues du multivers, vécues, non pas par un super-héros, mais par une cinquantenaire chinoise, propriétaire d’une laverie. Une idée réjouissante.
Deux films donc très différents mais similaires dans leur radicalité, dans leur intransigeance, dans leur complète dévotion à la notion de « film de genre ».

Le palmarès de cette 11ème édition reflète en effet ce désir de récompenser la puissante volonté de certains auteurs. Ainsi, pour les longs-métrages, trois œuvres se partagent le haut du podium. Le Grand Prix du Jury et le Prix du public sont attribués à Atlantic Bar de Fanny Molins. Déjà sélectionné à l’ACID du festival de Cannes, le film quasi-documentaire suit le quotidien des tenanciers et habitués du Atlantic Bar, à Arles. Un portrait honnête de gens dont on le dresse habituellement peu. Car c’est là aussi ce qui lie les oeuvres récompensées : la mise en scène de personnages qui ont encore trop peu partagés nos écrans. Rodéo de Lola Quivoron en est un exemple frappant : téméraire exploration du milieu de la moto et de pratique du cross-bitume. Également sélectionné et récompensé à Cannes, le film reçoit le Prix du Jury et le Prix de la critique. Quant au dernier (mais pas des moindres) à récolter deux trophées c’est Max Walker-Silverman. Côté américain, le jeune réalisateur se voit accorder le Prix du Jury et de la critique pour A love song. Un premier long-métrage bouleversant sur un état d’entre-deux : une hésitation de femme âgée entre l’attente et l’abandon. Percutant.

Un palmarès qui met donc en avant l’originalité, ou plutôt faudrait-il dire la marginalité. Car de cette 11ème édition – et la première post-pandémie – émane surtout un désir de redécouvrir l’autre. En tant que spectateurs et cinéastes. Le Champs-Elysées Film Festival fut cette année lieu de retrouvailles et de rencontres. On en retiendra une grande envie de partage, accompagnée d’une certaine forme d’euphorie nostalgique et d’impatience pour la suite…