La mort de Danton

Comédie-Française

© Christophe Raynaud de Lage

Danton et Robespierre font la révolution différemment. Alors que le premier encourage les débats et la modération, le second prone le soulèvement et la terreur. Simon Delétang met en scène à la Comédie-Française la pièce de Büchner sur un révolutionnaire hanté par ses actions, en quête de repos.

Le texte est restitué avec justesse, le plateau presque vide laisse résonner les mots. En privilégiant la parole aux corps, la mise en scène de Simon Delétang se trouve parfois un peu trop figée, et des longueurs se font sentir. Si le mouvement du décors, des comédiens n’est pas de mise, quelques effets de mise en scène sont les bienvenus pour rythmer la pièce. D’autant que certains ellipses textuelles font parfois que l’intrigue manque de clarté : le rôle des femmes est par exemple souvent mentionné sans être réellement expliqué.

Malgré tout, la force et la conviction de l’interpretation de Loïc Corbery font souvent oublier ces passages, quelque peu stoïques. Le comédien nous offre un révolutionnaire lassé, qui après tant de combats ne souhaite plus que le néant. Un homme qui réfute la guillotine comme outil de persuasion et désir que seule sa voix puisse rallier le peuple à sa cause. Tourmenté et sensible, ce portrait d’un homme prêt à reconnaître la violence de ses arguments passés et à en fabriquer de nouveaux, plus pacifiques est véritablement bouleversant : « quand les empreintes de pas de la liberté cesseront-elles d’être des tombeaux ? »

Les personnages sont sans cesse accompagnés de leurs ombres sur le plateau de Richelieu. La mort rode, les têtes roulent et le sang est monnaie d’échange. Les questionnements philosophiques, moraux et sensibles se font de plus en plus rares, au milieu de la tempête. Et peut-être les moments les plus réussis sont ceux où les comédiens s’avancent plus proche du public, pour évoquer avec lui ses doutes. Autre immense réussite : un Julien Frison, glaçant en Saint-Just. Contrairement à Clément Hervieu-Léger criard et emphatique en Robespierre. 

La mort de Danton, bien que marquée par de nombreuses inégalités, parvient avec ferveur à donner naissance au personnage profondément ambiguë et touchant de Buchner, et à relater tout le génie de l’œuvre de ce dernier.

La mort de Danton / De Georg Büchner / Mise en scène de Simon Deletang / Avec Loïc Corbery, Julien Frison, Jean Chevalier, Clément Hervieu-Léger, Julie Sicard et Marina Hands / 2h30 / Du 13 janvier au 4 juin 2023 salle Richelieu.

Auteur : Chloé Caye

Rédactrice en chef : cayechlo@gmail.com ; 31 rue Claude Bernard, 75005 Paris ; 0630953176

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