
A l’origine un one woman show joué à Londres puis à Broadway, Fleabag est adapté en 2016 sous forme de série en Angleterre par la BBC, avant d’être diffusée aux Etats-Unis sur Amazon et de connaitre cette année un remake français sur Canal + (Mouche).
Nous suivons Fleabag, une jeune femme interprétée par la créatrice et scénariste de la série Phoebe Waller-Bridge. Le personnage doit, dans cette première saison, faire le deuil aussi bien de sa mère – reconstruisant un relation avec son père, sa belle mère et sa soeur – que de sa meilleure amie, dont le suicide la hante. Elle utilise alors sa sexualité comme moyen de ne pas confronter ces problèmes et reprendre confiance en elle. Elle navigue donc entre une routine ennuyante avec son ex et les coups d’un soir qu’elle multiplie sans en tirer aucune vraie satisfaction. La véritable originalité que Fleabag propose est l’absence d’un quatrième mur : dans des apartés réguliers, elle s’adresse directement aux spectateurs. La caméra devient donc un personnage à part entière, jouant un rôle crucial dans l’histoire et permettant aux spectateurs de comprendre et appréhender tous les aspects de Fleabag. Derrière un humour constant et piquant, la série nous donne à voir un personnage complexe, défini par ses contradictions.
Par le biais du quotidien de Fleabag, elle aborde de manière très crue et frontale des thèmes actuels qui n’ont jamais été aussi bien développés et mis en scène à la télévision. Elle s’amuse à confronter un personnage qui utilise sa sexualité comme faire-valoir dans une société bousculée par le mouvement féministe. Alors que la première saison se concentre sur la présentation du personnage et la mise en évidence des dualités qui l’habitent, créant des micro-cataclysmes à l’échelle de sa vie personnelle; La deuxième se focalise sur la reconstruction de ces liens et l’apparition d’une nouvelle relation dans sa vie – la forçant à accepter d’être vue telle qu’elle est : aussi forte que vulnérable. L’attachement que l’on ressent pour ce personnage doit beaucoup à l’interprétation réussie de Waller-Bridge, elle même très fortement mise en valeur et sublimée par celles du superbe groupe d’acteurs l’entourant (Olivia Colman, Andrew Scott).
Le format court de la série exploitée sur seulement deux saisons permet à sa créatrice d’évoquer tous ces tournants narratifs dans l’évolution du personnage de manière concise, faisant de la série une oeuvre qui se consomme rapidement et intensément. A la fois essentiellement britannique dans le ton utilisé et si universelle dans les thèmes abordés, Fleabag se démarque irrévocablement dans la production audiovisuelle actuelle. Difficile de ne pas tomber sous le charme de cette série atypique qui allie si justement humour et sincérité.
Fleabag – Saison 1 et 2 / Créée par Phoebe Waller-Bridge / Avec Phoebe Waller-Bridge, Sian Clifford, Olivia Colman, Bill Paterson, Andrew Scott / Grande-Bretagne / 2 saisons de 6 x 30mn / 2016-2019.
Commentaire excellent sur une emission vraiment exceptionnelle!
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