
Park Chan-Wook est de retour avec Decision to leave, présenté cette année au festival de Cannes. Cette funeste romance entre un policier et une suspect dans une enquête de meurtre permet au réalisateur Coréen de déployer son immense talent de mise en scène.
Son style est reconnaissable entre mille : le réalisateur manie le mouvement comme personne. Palette chromatique parfois rugueuse, parfois veloutée. L’intrigue de Decision to leave se déploie au sommet des montagnes et au bord de la mer. De Vertigo, il reprend les rouages et de Basic Instinct, il conserve l’érotisme. Il donne à sa vénéneuse histoire une tournure aussi romantique que tragique. Entre le tueur et l’amoureux, qui est le plus dangereux ?
Sa caméra mime les élans des personnages, et leurs chutes. Il donne à ce jeu mortel de chat et de la souris un souffle épique. Les décors naturels se prêtent parfaitement au jeu et même la nature semble obéir aux lois de la caméra. Ce formalisme imposant n’écrase pas une intrigue complexe et mouvante – elle aussi. Est-ce l’histoire qui suit les images où les images qui dictent l’histoire, difficile de trancher. Mais Park Chan-Wook nous livre un thriller aussi retors que sublime. Il fragmente son récit, sa mise en scène et ses personnages. Eux n’arrivent pas à recoller les morceaux. D’un crime à l’autre, d’un baiser à l’autre, d’un lieu à l’autre. Ils ne se complètent pas mais se cherchent toujours. Leurs motivations sont hasardeuses, leurs sentiments encore plus. Ils sont à l’image de leur créateur : obstinés.
L’exercice de style auquel Park Chan-Wook s’essaye avec Decision to leave ne peut que s’applaudir : s’affranchir de toute limite, narrative ou esthétique, quitte à aliéner une partie du public. Téméraire et bluffant.
Decision to leave / De Park Chan-Wook / Avec Park Hae-Il et Tang Wei / Corée du sud / 2h18 / Sortie le 29 juin 2022.