
« Quand on commence à le décrire, on se rend compte qu’une vie ne suffira pas » confie nostalgiquement un proche du maestro à la caméra de Giuseppe Tornatore. Ce constat n’a pourtant pas freiné le réalisateur de Cinema Paradiso, qui s’est attelé à faire le portrait de ce compositeur de génie dans un documentaire dont la durée témoigne de la difficulté à le raconter brièvement.
Retraçant chronologiquement le parcours exceptionnel d’un homme qui a révolutionné musique et cinéma, le film assemble dans un maillage dynamique de précieuses archives, des extraits de films dont Ennio Morricone a composé la bande originale ainsi que des entretiens avec ses proches et ses collaborateurs. Mais les séquences les plus touchantes sont celles dans lesquelles le maestro s’exprime, la réalisation du projet ayant commencé avant sa mort. On a ainsi le privilège de voir et d’entendre cet homme discret et passionné chantonner ses plus célèbres pièces et raconter leur écriture dans des entretiens inédits.
Le film de Giusseppe Tornatore apporte un éclairage précieux et touchant sur le travail de l’artiste, mais pèche par sa durée, et par la redondance de certaines paroles. Si celles de Bertolucci, Clint Eastwood ou encore Roland Joffé permettent de mieux comprendre son œuvre, d’autres semblent superflues pour attester du génie de Morricone.
On regrette que Tornatore ait eu l’ambition démesurée de vouloir faire un film exhaustif, passant par tous les films et par toutes les voix pour rendre hommage au compositeur italien. Plusieurs entretiens sont instrumentalisés comme arguments d’autorité pour faire passer le message. Loin de renforcer l’éloge, l’abondance de paroles a tendance à affaiblir le propos par les répétitions. Le premier plan du film sur un métronome ne trompait pas sur la marchandise : le temps sera (un peu) long. On se serait bien passés, par exemple, de l’une des séquences finales qui montre les réemplois des compositions de Morricone dans la musique contemporaine pour prouver – était-ce bien nécessaire ? – la pérennité de son œuvre.
Toutefois, parce que c’est Tornatore, parce que c’est Morricone, on pardonne la tonalité élégiaque parfois maladroite du film, pour se laisser emporter par cet hommage riche et flamboyant à l’homme dont les compositions reconnaissables entre mille bercent nos vies.
Ennio / De Giuseppe Tornatore / Avec Ennio Morricone, Bernardo Bertolucci, Giuliano Montaldo, Dario Argento, Clint Eastwood, Quentin Tarantino / Italie / 2h47 / Sortie le 6 juillet.