
Faire un spectacle éreintant aussi techniquement virtuose que politiquement et esthétiquement vain. Vous n’en rêviez pas ? Romain Gavras l’a quand même fait. Après son sympathique Le Monde est à toi, qui brassait bon nombre d’influences cinématographiques dans une comédie à l’énergie communicative, le cinéaste revient par la grande porte, en faisant appel à Netflix pour financer son nouveau projet.
Avec Athena, Romain Gavras met à nouveau en image les banlieues parisiennes et se confronte cette fois-ci à un sujet d’actualité, en contant la révolte des jeunes de cité en réponse à une bavure policière. Exit la comédie puisque Athena se pare d’un sérieux à toute épreuve et décide de construire un roller coaster ostentatoire qui puise régulièrement dans les grandes figures de la tragédie grecque. Ainsi, dès son plan-séquence initial, tous les archétypes sont présents, de la fratrie divisée suite à la mort d’un des leurs jusqu’à l’omniprésence des chœurs dans la bande-originale. Le formalisme de l’action permet au cinéaste, par son attachement aux plans longs, d’implanter son récit dans un temps réel plus prenant et de construire un espace tentaculaire constamment envahi par la foule et le désordre. Le chaos organisé qui se déploie sous nos yeux obéit à une démarche indéniablement bien huilée, garantissant un divertissement haut de gamme, mais ne semble jamais se poser une question essentielle : quid de sa pertinence ?
Une fois passé le plaisir d’assister à une bande-démo, faisant état d’un certain talent à accumuler des images techniquement irréprochables, Athena bat de l’aile très rapidement et finit par tourner à vide. L’économie dramaturgique du début s’essouffle progressivement et laisse place à des échanges insignifiants entre des protagonistes purement fonctionnels que Romain Gavras semble plus occupé à iconiser bêtement qu’à caractériser en profondeur. Sûrement convaincu que la force de son film se trouve dans sa puissance iconographique, le cinéaste continue de multiplier les images grandioses, les tours de force fabriqués et les effets pyrotechniques pour cacher la vacuité de son propos. Le dispositif en mouvement constant n’a plus des airs de parti-pris mais de fuite en avant, comme si l’auteur cherchait à générer une énergie factice pour faire oublier toute tentative de discours. L’énième retournement en fin de récit finit de placer Athena comme une œuvre lâche, se dédouanant constamment au lieu d’adopter un véritable regard.
Athena / De Romain Gavras / Avec Dali Benssalah, Sami Slimane, Anthony Bajon, Ouassini Embarek / 1h37 / France / Disponible sur Netflix depuis le 23 septembre 2022.
super article, très pertinent sur l’équilibre bizarre des belles images/propos vide du film! 🎥
J’aimeAimé par 1 personne