Abou Leila

Au cinéma le 15 juillet 2020

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Slimane Benouari et Lyes Salem ©UFO Distribution

« Algérie 1994. » L’ensemble des informations de contextualisation du film est contenu dans ce panneau par lequel s’ouvre Abou Leila. On n’en saura pas plus, si ce n’est que le titre fait référence au nom d’un dangereux terroriste que deux hommes doivent retrouver dans le Sahara. Entre quête impossible et peinture d’une époque où le terrorisme atteignait un point de non-retour, le film nous mène sur les rives de la folie et du danger.

Sont-ils des collègues ou des amis ? Se font-ils confiance ou se méfient-ils l’un de l’autre ? Les protagonistes, Softi et S., sont réunis par un destin commun très trouble, aussi indécidable que la nature de leur relation. Ils avancent sur la même route mais semblent mués par des projets différents. Le premier, au volant de la voiture, adopte une posture droite et constante, le second est malade et vulnérable. Il faudra attendre les ultimes instants pour comprendre ce qui les lie… La rétention d’informations, que le film pratique avec brio, est à l’origine du désir d’en savoir plus tant pour les personnages que pour le spectateur, au sein d’une longue et tortueuse traversée du Sahara. Plus on en s’enfonce dans le désert, plus le film cède aux horizons du symbolisme, et s’ouvre vers des formes originales de récit. Il faut accepter de se laisser porter par le flux des images, les détours de la narration, la beauté des paysages (le désert) et la présence de ces deux personnages pour accéder à l’univers d’Abou Leila.

La plus grande réussite du film tient à la mise en place d’un enchaînement organique de scènes extrêmement différentes : des pauses très calmes, de la violence, des rêves, des scènes en voiture, des plans qui empruntent au film d’espionnage, d’autres au western… Le film ne prend jamais la direction attendue. Et lorsque la folie menace, on tente de se raccrocher aux visions d’un monde connu duquel le film nous éloigne, comme pour nous dire qu’à ce moment de l’histoire, tout était inconnu, on réveillait un monstre tapi jusqu’alors.

Le terrorisme est moins le sujet du film que ses conséquences psychologiques sur les êtres, à l’origine d’un mal révélé avec terreur et fracas. La seule certitude que nous laisse le film est celle, finalement, d’avoir assisté, éveillé, au déroulement d’un lent cauchemar, mi-réel mi-fantasmé. Amin Sidi-Boumédiène a construit un récit labyrinthique à la fois incarné et tout en résonances, retranscription fidèle d’une époque ressentie et non analysée. Le premier film inspiré d’un auteur à suivre.

Abou Leila / D’Amin Sidi-Boumédiène / Avec Slimane Benouari, Lyes Salem, Azouz Abdelkader / Algérie – France / 2h15 / Sortie le 15 juillet 2020.

Retrouvez notre entretien avec le réalisateur Amin Sidi-Boumédiène.

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