
« D’après une histoire vraie » annonce l’affiche de Divertimento, rappelant l’importance que sa réalisatrice Marie-Castille Mention-Schaar accorde à l’ancrage social et à la vraisemblance des histoires qu’elle porte à l’écran. L’histoire en question est celle de Zahia et Fettouma Ziouani, des sœurs jumelles qui ont fait preuve d’une persévérance spectaculaire pour répondre à leurs ambitions musicales. La première rêve de devenir cheffe d’orchestre ; la seconde, violoncelliste professionnelle. Mais le lycée du VIIIe arrondissement dans lequel elles font leur entrée en terminale et les conservatoires parisiens n’accueillent pas à bras ouverts ces deux musiciennes du 93. Leur origine algérienne et leur appartenance à la classe moyenne détonne dans le milieu blanc et riche de la musique classique. Pour couronner le tout, on répète à Zahia que les femmes ne font pas de bonnes cheffes d’orchestre. Mais qui ne tente rien n’a rien : Zahia s’accroche à son rêve et fait tout pour qu’il se réalise.
Cette fiction « inspirée de faits réels » aurait pu devenir un simple véhicule au vieux mythe méritocratique. Mais sa sincérité lui évite de sombrer dans un idéalisme naïf. Bien qu’il soit plein de bons sentiments, Divertimento n’efface jamais la brutalité du déterminisme social – bien au contraire. L’inégal accès à la culture est ainsi pointé du doigt par la réalisatrice, qui retrouve un thème déjà abordé avec finesse dans Les Héritiers.
Divertimento doit sa justesse de ton à une étroite collaboration entre la réalisatrice, les actrices et les sœurs Ziouani. Zahia et Fettouma ont transmis leur récit et leur musique à Marie-Castille Mention-Schaar, et leur gestique de cheffe d’orchestre et de violoncelliste à Oulaya Amamra et Lina El Arabi. L’ancrage biographique et la belle interprétation des comédiennes ont prémuni le film contre les fausses notes. Quant à la musique, la réalisatrice a mis un point d’honneur à ce qu’elle soit enregistrée en son direct. Ce travail sonore donne à entendre les dynamiques qui animent un orchestre, ensemble d’individualités coordonnées pour former une seule entité.
Mais à côté de cela, la mise en scène classique – voire plate – donne l’impression d’avoir déjà vu la partition du film. Un hiatus se fait jour entre l’audace des protagonistes et le manque d’inventivité de la mise en scène. Toutefois, si l’on accepte cette simplicité, on découvre alors ce qui anime la réalisatrice depuis Bowling et Les Héritiers : la constitution d’un collectif. L’orchestre que créé Zahia fait ainsi écho à celui qui se créé pour la réalisation du film. Naomi Armarger, qui a fait ses débuts au cinéma comme actrice dans Les Héritiers puis Le Ciel attendra, est ici cheffe opératrice pour son premier long-métrage. Et Ariane Ascaride, personnage principale des Héritiers, fait une apparition dans le film de son amie. Cette conception communautaire du cinéma se traduit ainsi à l’image. Et finalement, loin de décevoir son titre programmatique, Divertimento offre un feel-good movie modeste sur l’esprit de corps, la jeunesse et sa pugnacité.
Divertimento / De Marie-Castille Mention-Schaar / Avec Oulaya Amamra, Lina El Arabi, Niels Arestrup / France / 1h50 / Sortie le 25 janvier.