
Le Batman de Matt Reeves s’annonçait prometteur : plus sombre, plus moderne, plus dense esthétiquement. La première séquence est à l’image de ces promesses. Ce que Batman inspire c’est avant tout de la peur. Il n’est pas justice, il est vengeance. C’est dans cet état d’esprit que nous apparait le Batman de Robert Pattinson. Encore faut-il l’entrevoir, tapi dans l’ombre. Figure imposante et terrifiante. Gotham perpétue une incassable chaine de paranoïa et de violence : les honnêtes gens ont peur des criminels, les criminels ont peur de la chauve-souris. Mais qui aura le plus peur ?
C’est dans cette atmosphère chaotique et alléchante que débute le film de Matt Reeves, avant que l’on ne découvre que derrière l’armure, il n’y a rien.
The Batman se veut polar. Le justicier masqué devient détective, ou du moins il essaye. Sur fond d’enquête, l’intrigue patine. Robert Pattinson en adolescent contrarié résout péniblement les énigmes. Torturé devient synonyme d’apathique et Bruce Wayne manque autant de vivacité que de charisme.
Si l’intrigue est peu convaincante, on saura reconnaitre que la photographie est plus travaillée. Malheureusement, une esthétique sépulcrale apposée à un casting qui se distingue par sa nonchalance ne va pas sans provoquer quelques bâillements. En voulant revenir au caractère originel du Batman, le réalisateur l’en éloigne un peu plus. Mettre en exergue l’aspect rugueux – voire franchement sinistre – de Gotham et son héros nécessitait qu’un metteur en scène ose la transparence; Matt Reeves se réfugie derrière une opacité vaniteuse. Il ne cherche pas à nous raconter l’histoire par le prisme de sa mise en scène, mais bien à nous raconter sa mise en scène par le prisme de l’histoire.
En voulant à tout prix éviter de faire un film de super-héros au profit du film d’auteur, Matt Reeves nous prouve qu’il n’est pas évident de réaliser un bon film de super-héros ou un bon film d’auteur. Résultat ? The Batman n’est ni l’un, ni l’autre.
The Batman / De Matt Reeves / Avec Robert Pattinson, Zoe Kravitz, Colin Farrell, Paul Dano, John Turturro, Jeffery Wright et Andy Serkis / États-Unis / 2h55 / Sortie le 2 mars.