Dark Waters

Au cinéma le 26 février 2020

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Mark Ruffalo © Participant & Killer Films

À chaque fois qu’un film semble détonner dans la filmographie d’un réalisateur, nous avons à tendance à chercher une bonne raison à ce changement, influencés par la théorie des auteurs. C’est le cas de Dark Waters. Pourquoi proposer à Todd Haynes, habitué des mélodrames incandescents (Loin du paradis, Carol), la réalisation de ce pur film-dossier qui retrace l’histoire vraie de Robert Bilott, un avocat ayant dénoncé les pratiques de l’entreprise de produits chimiques DuPont ?

C’est le comédien Mark Ruffalo qui est allé chercher le cinéaste pour lui demander de mettre en scène Dark Waters. Si ce n’est pas le film le plus personnel de Todd Haynes, il n’est cependant pas moins le résultat d’un travail de mise en scène impeccable, finalement proche du classicisme qui le singularise actuellement. Cette mise en scène invisible se mêle avec réussite à une photographie aussi noire et maussade que les prairies où périssent les vaches à cause des produits chimiques de DuPont. Cette facture visuelle nouvelle est d’autant plus propice à créer des surprises en son sein, comme lors de cette séquence hallucinante tout droit sortie d’un film d’horreur, où la menace de la vache folle se concrétise en une vision cauchemardesque.

À la façon d’Erin Brockovich (Steven Soderbergh, 2000), Dark Waters suit la détermination de son héros seul contre la puissance d’un système. Todd Haynes parvient à nous intéresser à son parcours malgré le chemin balisé que son film emprunte, avec son lot de scènes obligées (le personnage seul au milieu des dossiers à éplucher, le porte-à-porte pour recueillir des informations, certains rebondissements) et de personnages secondaires plutôt faibles (on s’étonnera que le réalisateur, qui a pourtant composé tant de magnifiques personnages féminins, ne se soit pas davantage préoccupé de la femme du héros incarnée par Anne Hathaway). C’est surtout dans le mouvement adopté par le personnage que le film se distingue, et passionne même. L’avocat se retourne contre ce vers quoi il plaide habituellement : spécialisé dans la prise de défense des grands groupes industriels, le voici se saisir de sa voix de juriste expérimenté en faveur d’un paysan dont l’histoire l’a touché, et l’a rappelé à lui-même. Dark Waters est une belle histoire de moralité, qui pousse un homme à faire face à sa propre communauté. Parce que le film est porté par un engagement et une éthique infaillibles, l’obstination de son personnage, aussi austère soit-il (incarné avec une sobriété bienvenue par Mark Ruffalo), est communicative.

Dark Waters / De Todd Haynes / Avec Mark Ruffalo, Anne Hathaway, Tim Robbins / Etats-Unis / 2h08 / Sortie le 26 février 2020.

2 réflexions sur « Dark Waters »

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