Drunk

Au cinéma le 14 octobre 2020

Mads Mikkelsen (Martin) © Henrik Ohsten / Haut et Court

Thomas Vinterberg excelle dans l’art de filmer le point de non-retour. Cet instant de tension, au bord de la chute. Ses personnages sont semblables à des funambules tentant de sortir indemnes de cet exercice périlleux. Dans son nouveau film Drunk, c’est l’alcool qui devient moteur de passage entre ces deux états.

Le principe est simple : un philosophe norvégien affirme qu’il manquerait à l’homme 0,5 grammes d’alcool par litre de sang pour que son potentiel professionnel et social soit entièrement révélé. 0,5 grammes d’alcool équivaut à deux verres de vin. Pas assez pour être fin saoul mais suffisamment pour que les inhibitions mentales et corporelles commencent à disparaître. Ni complètement ivre ni entièrement sobre : le parfait entre-deux.

Lorsque des professeurs de lycée se décident à mettre en pratique la théorie du fameux philosophe, ils donnent au réalisateur l’opportunité d’appréhender les différentes réactions humaines à cet état intermédiaire. Il devient alors évident qu’après avoir gouté à l’ivresse, certains personnages seront incapables de faire demi-tour. Cette difficulté pour certains à en rester volontairement à une dose d’alcool, certes optimale, lorsqu’ils pourraient avoir plus, donne à l’intrigue et au film des tournures respectivement dangereuse et tragique.

Mais ce qui permet véritablement à l’œuvre de briller reste bien cet hommage fantastiquement drôle et touchant à l’alcoolémie mitigée. De ces personnages constamment pompettes émanent une joie et une énergie incroyablement communicatives. Du groupe de comédiens survoltés (Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larsen, Magnus Millang et Lars Ranthe) se dégage un esprit de camaraderie d’une sincérité vigoureuse et duquel Vinterberg n’exclut jamais la caméra. Le cinéaste ne cesse de les travailler au corps, si bien qu’on en vient presque à sentir l’odeur d’alcool dans leur souffle. À cette proximité captivante, il ajoute des transitions plutôt baroques et des ruptures de séquences assez violentes. Le tout donnant au film un rythme inattendu et fiévreux.

Si l’alcool sert d’exutoire aux personnages, Vinterberg ne néglige pas leur état d’esprit manifestement morose lorsqu’ils sont sobres. Et c’est avec une grande bienveillance qu’il filme ces professeurs qui, constamment en contact avec de jeunes élèves, ne parviennent pas à accepter leur vieillissement. Cette expérience sur l’alcoolémie qu’ils décident de conduire, quelles que soient ses conséquences, leur offre une dernière occasion de communion amicale et cathartique.

Drunk est une œuvre optimiste et épatante sur la nostalgie et la transmission. L’amitié et la famille. Le manque et l’excès. Une apologie enjouée de l’alcoolisme modéré, et l’occasion pour Mads Mikkelsen de danser.

Drunk / De Thomas Vinterberg / Avec Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larsen, Magnus Millang, Lars Ranthe / Danemark / 1h56 / Sortie le 14 octobre 2020.

Auteur : Chloé Caye

Rédactrice en chef : cayechlo@gmail.com ; 31 rue Claude Bernard, 75005 Paris ; 0630953176

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