Vampires, de Dracula à Buffy

La Cinémathèque française

Un long couloir obscur, éclairé de (faux) chandeliers, conduit le spectateur à la première salle de l’exposition que la Cinémathèque consacre à la créature légendaire ayant inspiré, de Murnau à Coppola, tant de cinéastes. Le ton est donné : c’est à la fois l’exploration d’un mythe et la reconstitution d’une ambiance qu’ont recherché les commissaires. Et il faut leur reconnaître une certaine inventivité. Un tableau numérique changeant vous présente, en fondu enchaîné, une galerie de vampires iconiques, dont la succession met en évidence leurs liens de parenté ; un cercueil étrangement posé au milieu d’une salle se révèle être une vitrine d’exposition ; plus loin, vous passez devant un miroir dans lequel vous ne vous reflétez pas…

Littérature, peinture, arts plastiques, bande dessinée et bien évidemment cinéma, sans oublier publicités, campagnes de sensibilisation et autres iconographies populaires s’étant réapproprié la figure du vampire, nous font suivre les évolutions de sa symbolique au cours du temps. Depuis le défi que s’étaient lancé au début du XIXe siècle Mary Shelley, Lord Byron et John Polidori d’écrire l’histoire la plus effrayante possible (ayant inspiré Frankenstein à la première et The Vampire au dernier), jusqu’aux adolescents mièvres de Twilight, il a effectivement connu bien des changements. Si dans le premier cas la mode du roman gothique en fait un être terrifiant, il est aujourd’hui mainstream au point de pouvoir servir d’argument promotionnel pour des produits aussi nobles que du fromage à l’ail ou des jus de fruits industriels. Élégant ou bestial, érotique ou monstrueux, empathique ou insensible, ses incarnations sont nombreuses et le mérite de l’exposition est de nous faire comprendre en quoi elles incarnent les préoccupations de chaque époque, avec un souci d’exhaustivité marqué.

Le visiteur effectue ce parcours de façon chronologique, chaque salle abordant un thème et une période, à grand renfort d’extraits de films, d’œuvres diverses, d’affiches, et d’objets issus de tournages cultes. Les cinéphiles fétichistes seront ravis de pouvoir contempler le masque porté par Klaus Kinski dans le Nosferatu de Werner Herzog, ou le costume de Gary Oldman dans le Dracula de Coppola. C’est l’occasion de découvrir la masse, assez effrayante en elle-même, d’œuvres ou de navets inspirées par le vampire. Les néophytes prennent des notes pour nourrir leurs listes de films à voir, tandis que les experts s’exclament avec satisfaction devant chaque nouvelle salle dont ils reconnaissent la plupart des références.

Certes, quelques reproches pourront être fait à l’exposition. Son côté fourre-tout, et quelques tentatives de rattacher au thème des objets qui ne lui sont pas liés de façon très évidente (que vient faire là cette toile de Basquiat ?), accroc qui ne rompt que momentanément le charme de l’expérience. Son ambition d’exhaustivité laisse de côté notamment le jeu vidéo, où la figure vampiriques est pourtant régulièrement exploitée. Enfin, les œuvres évoquées sont assez peu analysées, et quelques panneaux explicatifs supplémentaires auraient pu permettre d’approfondir la démarche ; mais l’ambition de proposer une expérience grand public l’imposait sans doute, et parvenir à constituer cette atmosphère tout en instruisant les visiteurs reste indéniablement une réussite.

Nous vous conseillons bien évidemment de coupler votre visite avec une projection parmi les nombreuses que propose la Cinémathèque sur le même thème. L’occasion idéale d’étancher la soif de visionnages vampiriques qui ne manquera pas de s’emparer de vous au sortir de l’exposition…

Exposition Vampires, de Dracula à Buffy, à la Cinémathèque française. Du 9 octobre 2019 au 19 janvier 2020. Toutes les infos sur le site de la Cinémathèque.

Et puis nous danserons

Au cinéma le 6 novembre 2019

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Et puis nous danserons n’est pas le premier film à mettre la danse en scène dans l’idée de traiter un sujet « de société », et il ne sera pas le dernier. Mais si on peut jouer à trouver un certain nombre d’exemples, de Billy Eliott à Girl, ils sont probablement moins nombreux à traiter de la danse géorgienne, qu’on pourrait grossièrement présenter aux néophytes comme une danse traditionnelle exécutée avec la rigueur et l’exigence de la danse classique. Et c’est avec beaucoup d’intelligence que Levan Akin en fait l’élément central de son histoire, un pivot dramatique, qui cristallise toutes ses tensions : là où Merab cherche désespérément un moyen de s’exprimer, il se trouve confronté à une tradition ancestrale, à un élément constitutif d’une identité nationale, devant incarner ses codes et ses valeurs. Cette danse devient le lieu de l’opposition entre le désir de Merab de se révéler, et les forces qui l’en empêchent.

Si nos héros sont jeunes et ambitieux, s’ils espèrent faire de cette danse leur métier et rivalisent pour intégrer les ballets les plus prestigieux, le véritable défi qui leur est posé n’est pas celui de la compétition ou de la performance. En dansant, ils se heurtent surtout à une certaine idée de la masculinité, celle qui veut qu’on danse raide car on est un homme, ou que dans les vestiaires on multiplie les blagues graveleuses. Inutile de préciser que l’homosexualité est loin d’être acceptée dans le pays, et encore moins au cœur d’une de ses institutions les plus emblématiques. Quand l’équipe du film a contacté un ensemble national dans l’idée d’obtenir de l’aide pour la préparation du tournage, celle-ci leur a été refusée au prétexte que l’homosexualité n’existait pas dans la danse géorgienne…

Lutter contre cette négation, c’est alors s’exposer. Et à mesure qu’on suit l’histoire de Merab, nous parviennent par les conversations des personnages les tristes échos des mésaventures d’un certain Zaza, danseur de ballet surpris avec un homme, auquel le traitement qu’on réserve révèle toute la violence à laquelle sont exposés les homosexuels géorgiens lorsqu’ils sont découverts.

Tout en évoquant cette violence, Levan Akin se refuse pourtant à la montrer. L’histoire qu’il choisit de nous raconter n’est pas celle d’une persécution ; mais, des appartements pauvres dont on coupe l’électricité aux quartiers underground où se réfugie une culture queer inattendue, de la rigueur de la salle de danse à la liberté d’une brève histoire d’amour, Et puis nous danserons est le récit, émouvant et plein d’espoir, d’une possible libération.

Et puis nous danserons / De Levan Akin / Avec Levan Gelbakhiani, Bachi Valishvili, Ana Javakishvili / Suède, Géorgie / 1h50 / Sortie le 6 novembre 2019.

Au bout du monde

Au cinéma le 23 octobre 2019

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©Eurozoom
Yoko, une jeune journaliste japonaise, est chargée par sa chaîne de télévision de tourner un reportage sur l’Ouzbékistan. Elle et son équipe cherchent au jour le jour des sujets à filmer, errant d’un endroit à un autre à travers le pays. Mais la pression imposée par ses collègues et le dépaysement qu’elle ressent dans des endroits peu familiers lui pèsent de plus en plus.

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Portrait de la jeune fille en feu

Au cinéma le 18 septembre 2019

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©Pyramide Distribution

Marianne (Noémie Merlant), peintre ayant repris l’atelier de son père, est chargée par une comtesse de réaliser le portrait de sa fille Héloïse (Adèle Haenel). Mais ce tableau scellera un mariage que la jeune femme ne désire pas ; Marianne doit donc le réaliser en secret, se faisant passer pour une simple demoiselle de compagnie. Un jeu de regard commence entre les deux femmes.

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