Gloria!

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La région de Venise à l’aube de l’année 1800. À la fin d’une messe dominicale, on annonce la venue du Pape Pie VII pour le mois prochain. Perlina (Paolo Rossi) exerce le pouvoir religieux à Sant’Ignazio : il est le prêtre, le chef de l’ensemble musical, ainsi que le décideur de son église et de ce qui l’entoure. Cet homme – droit devant ses fidèles mais imbuvable macho et incapable musicien l’eucharistie passée – s’attèle à la lourde tâche de composer la musique du concert organisé pour la venue du souverain pontife.

Dans son premier long-métrage, Margherita Vicario s’intéresse à la situation des jeunes femmes des congrégations religieuses de la fin du XVIIIème siècle à qui l’on apprenait la musique. Ainsi, dans le film, les musiciennes composant l’orchestre de Perlina sont également résidentes de son orphelinat. Mais parmi les jeunes filles vivant à l’institut, l’une d’entre elles détonne : sa robe beige et abimée se désaccordant du bleu clair et des froufrous blancs de celle des autres. Pour cette dernière, toute tâche ménagère quotidienne est prétexte à un fabuleux concert faisant vibrer les parois de sa caisse de résonance intérieure. Teresa (Galatea Bellugi), la servante martyrisée de l’institut se découvre, de manière miraculeuse, un don pour jouer du piano. Vous imaginez la suite – et vous imaginez bien, car tout cela est très prévisible.

Dès lors, les jeune filles acceptent Teresa dans leur bande. Alors que Perlina ne réussit pas à enchaîner l’écriture de deux notes sur une partition, les jeunes filles s’adonnent les nuits – à l’initiative de Teresa – à un laboratoire d’expérimentations musicales beaucoup plus rythmées que les oeuvres qui se transmettent à l’époque. Elles pianotent librement les prémices de ce qui n’est alors pas considéré comme de la musique et que l’on appelle aujourd’hui le jazz, le slam, la musique pop ou encore le r’n’b. « J’ai écouté mon oreille », lancera l’une d’entre elles à Perlina, alors qu’elle se laisse aller à une improvisation personnelle lors d’une répétition.

Dans ce conte de fées peuplé de méchants et de gentilles, la visée de Margherita Vicario est claire : remettre en cause le patriarcat, l’ordre mis en place par l’église catholique à l’époque ainsi que la faible place laissée aux femmes au sein de ces institutions, en empêchant la transmission de leurs découvertes. Il est regrettable qu’un film pourtant si moderne dans son discours emprunte une facture formelle si classique et des représentations tant archétypales. Ce qui s’applique à la musique dans le récit, ne s’applique pas au travail des scénaristes. Margherita Vicario n’a t-elle pas « écouté son oreille » ?

Gloria! / De Margherita Vicario / Avec Galatea Bellugi, Carlotta Gamba, Veronica Lucchesi / Italie, Suisse / 1h46 / Sortie le 12 juin 2024.

Auteur : Lise Clavi

Lise. Fondamentalement indécise, mais de cinéma, définitivement éprise. Mon année à travailler pour des festivals cinématographiques, mon temps libre à cultiver mon intérêt pour l’actualité artistique. Décoller vers une nouvelle destination pour filmer de nouveaux horizons.

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