La « Teenage Apocalypse Trilogy » de Gregg Araki, ou quand l’amour et la communauté ne suffisent pas

Actuellement au cinéma – ressortie

© Capricci

On espère depuis longtemps que Gregg Araki délaisse un peu la réalisation d’épisodes de séries (Dahmer, Riverdale, 13 Reasons Why…) pour se remettre au cinéma. C’est qu’il y a plus de dix ans depuis son dernier long métrage, White Bird in a Blizzard (2014) – qui avait par ailleurs reçu un accueil mitigé. Dans l’attente de I Want Your Sex (avec Olivia Wilde et Charli xcx), toujours sans date de sortie, on peut se replonger dans les débuts du réalisateur pionnier de la Queer New Wave : le 17 septembre, la « Teenage Apocalypse Trilogy », compose de Totally F***ed Up (1993), The Doom Generation (1995) et Nowhere (1997), s’offre une ressortie en salle.

Continuer à lire … « La « Teenage Apocalypse Trilogy » de Gregg Araki, ou quand l’amour et la communauté ne suffisent pas »

Entre le ciel et l’enfer

Actuellement au cinéma / Ressortie

© 1963, Toho Co., Ltd All rights reserved

De 1963 à 2025, quelque chose de comique s’est glissé dans la scène qui ouvre Entre le ciel et l’enfer. Dans le vaste salon d’une luxueuse villa qui surplombe la ville, un groupe d’hommes en costumes, cigarettes et mines graves, devisent ensemble du goût des femmes en matière de chaussures à talon. Rassemblés autour de nouveaux modèles d’escarpins bon marché, calqués sur les tendances du moment, l’enjeu pour ces industriels du soulier est de maximiser les profits de leur entreprise. Le sérieux papal avec lequel ils présument des besoins de leurs clientes apparaît délicieusement désuet aux spectateur·ices d’aujourd’hui, qui regardent la séquence un sourire en coin. L’attitude d’un des individus tranche néanmoins avec le reste de cette bande de rigolos complaisants. Mutique, il ne semble pas goûter les jugements à l’emporte-pièce de ses camarades et finit tout bonnement par exploser : pour lui, hors de question de se vautrer dans l’air du temps afin d’appâter les consommatrices, si cela signifie sacrifier la qualité du produit.

Continuer à lire … « Entre le ciel et l’enfer »

La Forteresse noire

Actuellement au cinéma / Ressortie

© Associated Capital

Il était temps qu’un distributeur se décide à restaurer La Forteresse noire, second film de Michael Mann demeuré invisible dans des conditions décentes depuis sa sortie initiale en 1983. Rescapé des ténèbres par Carlotta, le long-métrage nous parvient comme un artefact maudit, un objet précédé par sa légende que l’on découvre avec un mélange d’excitation et de crainte. Et pour cause : sa longue absence du catalogue mannien n’a-t-elle pas été en réalité une aubaine pour les exégètes de l’œuvre du cinéaste, bien plus à l’aise dans leur office une fois dispensé·es de la tâche ardue d’y rattacher cette note dissonante ?

Continuer à lire … « La Forteresse noire »

Lan Yu

Actuellement au cinéma

© Carlotta Films

Le désir peut-il résister au passage du temps ? C’est l’une des questions que pose Lan Yu, film magnifique du méconnu Stanley Kwan, dont une partie de l’œuvre fait l’objet d’une ressortie en salles orchestrée par Carlotta. Réalisé cinq ans après son coming-out out, faisant de Kwan l’un des rares cinéastes ouvertement gays d’Asie, le film raconte l’histoire d’amour qui unit Handong, golden boy de la finance à Pékin, et Lan, un étudiant désargenté qui s’essaie à la prostitution. Le scénario est adapté d’un roman anonyme publié sur internet en 1998 et aborde par un prisme intime la clandestinité forcée des relations homosexuelles dans la Chine post-Mao.

Continuer à lire … « Lan Yu »

Hitcher

1986 / Ressortie le 10 avril 2024

© Tamasa Distribution

Passé relativement inaperçu à sa sortie en 1986, Hitcher de Robert Harmon nous revient dans une copie restaurée, permettant d’enfin rétablir cette erreur d’appréciation. Il faut dire que le projet d’origine avait de quoi dérouter. Pensé par son auteur comme un film d’exploitation gore et ultra-violent centré sur la figure d’un autostoppeur psychopathe, le scénario a subi de nombreux remaniements jusqu’à finir amputé de ses scènes les plus explicites. En résulte un thriller assez bancal, littéralement troué, mais c’est justement dans ses manquements, ses absences, que ce film ménage des espaces de liberté particulièrement féconds pour le spectateur.

Continuer à lire … « Hitcher »

Anna

1967 / Ressortie le 29 novembre 2023

© Malavida

La comédie musicale de Pierre Koralnik réalisée en 1967 pour la télévision est un ovni formel et un cadeau sonore pour tous les aficionados de Serge Gainsbourg. Le réalisateur fait de son coup de foudre amoureux la prise d’une photo – un coup de flash ? – comme l’avait précédemment fait Stanley Donen dans Funny Face (1957). La muse n’est plus ici Audrey Hepburn mais Anna Karina, au sommet de son charme.

Continuer à lire … « Anna »

Lune Froide

1991 / Ressortie le 15 novembre 2023

© Malavida Films

Sur la plage abandonnée, coquillages et crustacés. Sur la plage abandonnée, guitares et macchabées. Sous l’œil rond de la pleine lune inquisitrice et au rythme des solos de Jimi Hendrix, Dédé et Simon errent d’erreur en erreur.

Continuer à lire … « Lune Froide »

Vie privée

1962 / Ressortie le 5 juillet 2023

© Malavida / Gaumont

Genève. Jill (Brigitte Bardot) aime danser. Elle croit même aimer Dick (Dirk Sanders), qu’elle décide de suivre à Paris. Puis Jill se lasse de la danse, de même que de son partenaire de valse. Elle devient une vedette et c’est à son tour de faire tourner les têtes. Si on l’identifie à présent dans la rue et en première page des journaux, ces inconnus, qui la connaissent pourtant, s’affairent plus de ses liaisons amoureuses que de ses talents d’actrice. Retour à Genève, l’occasion pour Jill de retrouver son ami Fabio (Marcello Mastroianni).

Continuer à lire … « Vie privée »

Rencontre avec : Philippe Miller

À l’occasion de la ressortie, en version restaurée, de Jeanne et le garçon formidable (1997), nous avons eu la chance de discuter avec Philippe Miller, le compositeur du film.

Comment s’est déroulé votre rencontre avec Jacques Martineau et Olivier Ducastel ; comment a eu lieu votre arrivée sur le projet ?

Ma femme est monteuse et il se trouve qu’elle avait déjà travaillé avec le producteur de Jeanne et le garçon formidable. Il lui avait parlé de ce projet de comédie musicale et lui a appris que j’en avais déjà composé une pour le théâtre. Je devais donc travailler avec Jacques Martineau et ma femme a pensé que ce serait bien d’avoir aussi quelqu’un qui avait déjà travaillé sur une comédie musicale de cinéma ; car aucun de nous n’avait cette expérience. Elle en a donc parlé à Olivier Ducastel, sachant qu’il avait travaillé sur les derniers films de Jacques Demy. Ils sont tous venus à cette occasion et se sont rencontrés chez nous.

Vous avez composé les musiques à partir du scénario ? Comment se passait votre collaboration avec Jacques Martineau, qui a écrit les paroles des chansons ?

Quand on fait des musiques de films, on arrive souvent au dernier moment. Sauf si un réalisateur veut une musique en amont pour une certaine séquence, mais généralement, on arrive lors du montage. Dans le cas de Jeanne, la musique a été filmée, en quelque sorte. Cela inverse totalement le rapport car elle arrive juste après le scénario. C’était un souhait que nous avions tous : tourner avec les enregistrements définitifs, les voix des acteurs (sauf une), pour créer une véracité au moment de l’interprétation. Afin que les acteurs ne s’appuient pas sur des maquettes. Et puis, à l’époque il y avait assez peu de maquettes finalement, toutes les musiques que j’ai composées, je leur ai d’abord fait écoutées au piano, en chantant : à l’ancienne ! Mais notre choix était donc d’aller en studio, de faire enregistrer les vrais acteurs et puis d’enclencher le tournage. Etant donné que Jacques est aussi chanteur et musicien, il avait déjà écrit quelques paroles en pensant à des mélodies. Il était vraiment très humble par rapport à ça, il m’a dit que je n’avais aucune obligation de les utiliser mais qu’il ne pouvait simplement pas s’empêcher de penser à des mélodies lorsqu’il écrivait les paroles. Il y en a certaines que j’ai gardées, d’autres que j’ai transformées et quand, pour certains textes, il n’avait rien, j’ai eu l’entière liberté de composer ce que je voulais.

Aviez-vous déjà le désir de piocher dans plein de registres musicaux différents : java, tango, variétés ou encore jazz ?

Continuer à lire … « Rencontre avec : Philippe Miller »

Fleur Pâle

1964 / Ressortie le 31 mai 2023

© 1964 / 2022 SHOCHIKU CO., LTD. 

Dans Fleur Pâle, Masahiro Shinoda met en scène le retour de Muraki après trois ans d’emprisonnement pour homicide. Le meurtre de quelqu’un d’autre devient ici l’ultime don de soi aux yakuzas. La vie de Muraki appartient au clan, elle appartient à Tokyo. Seul, il erre dans cette ville dont les lumières bleutés subliment son spleen.

Continuer à lire … « Fleur Pâle »