
Porter des collants verts moulants en conservant un semblant de dignité n’est pas donné à tout le monde. Errol Flynn atteint l’apogée de son succès lorsqu’il interprète le héros éponyme dans Les Aventures de Robin des bois en 1938. Sa carrière hollywoodienne n’avait pourtant démarré que quelques années plus tôt : en 1935 le jeune acteur australien joue un corps inerte dans The Case of the Curious Bride, réalisé par un certain Michael Curtiz.
C’est le début d’une longue et fructueuse collaboration entre les deux hommes (ils tourneront douze films ensemble). Après une experience comme figurant devant sa caméra en 1935, Michael Curtiz propose la même année à Errol Flynn son premier grand rôle dans Capitaine Blood. Le cinéaste qui travaille déjà aux Etats-Unis depuis une dizaine d’années est sur le point d’offrir à l’industrie certains de ses meilleurs films de cape et d’épée.
Peter Blood et Robin des bois combattent tous deux l’injustice. Le premier est un médecin condamné injustement par un roi frivole, le deuxième un lord anglais déclaré hors-la-loi par un roi imposteur. Les personnages d’Errol Flynn deviennent les défenseurs des opprimés, des justiciers inébranlables face à une autorité malhonnête. Avec un charme enchanteur et des bouclettes bien coiffées même lors des batailles les plus mouvementées, le galant criminel est toujours vainqueur. Pour ce faire, il peut compter sur l’aide de la belle et audacieuse Olivia de Havilland. Qu’elle soit Marianne ou Arabella, l’actrice forme avec Errol Flynn un couple tendre et mythique. Michael Curtiz n’hésite d’ailleurs pas à exploiter cette alchimie dont il est à l’origine : il réunit Errol Flynn et Olivia de Havilland dans pas moins de sept films, donnant naissance à l’une des romances les plus discutées de l’âge d’or hollywoodien.

Le cinéaste comprend effectivement très rapidement l’attraction de son couple vedette. Si dans Capitaine Blood la romance ne fait office que d’intrigue d’arrière plan, elle devient un élément narratif essentiel dans Les Aventures de Robin de bois. Il en va de même pour les scènes d’action : limitées à quelques duels et un affrontement final explosif dans Capitaine Blood, elles se multiplient dans Les Aventures de Robin des bois. Dans l’équipe récurrente de comédiens que Curtiz emploie, il est alors impossible de ne pas mentionner les adversaires de Blood et Robin : respectivement le capitaine Levasseur et Sir Guy de Gisbourne. Les plus charmants des antagonistes étant toujours interprétés par l’inimitable Basil Rathbone.
Si le schéma narratif est essentiellement le même, Les Aventures de Robin des bois pousse à l’extrême tout ce que son prédécesseur commençait à mettre en place : plus de spectacle, plus de cascades, plus d’amour, plus de figurants et surtout, plus de couleurs. Les quelques années qui séparent les deux films marquent en effet l’investissement de la Warner dans la couleur. L’imposante ombre des palmiers jamaïquains laisse place au vert flamboyant de la forêt de Sherwood. Les nuances grises et magnétiques des décors sont remplacées par des costumes aux couleurs éblouissantes. L’esthétique noire et blanche des studios, que Michael Curtiz maniait à la perfection, est délaissée au profit d’extérieurs réels et florissants qu’il capture avec tout autant de maîtrise.

Si l’on peut donc facilement admettre que Les Aventures de Robin des bois est une version plus accomplie et grandiose de Capitaine Blood, le travail formel que le réalisateur poursuit est pareillement impressionnant dans les deux œuvres. Le label de films d’aventures qui s’y appose n’empêche pas le cinéaste de soigner le moindre plan. Michael Curtiz ne sacrifie jamais la recherche picturale au profit du divertissement. Il allie avec génie le spectaculaire à l’artistique et filme harmonieusement l’action. Si bien qu’il ne tient plus qu’au spectateur de décider s’il préfère l’air marin hollywoodien aux légendes anglaises rocambolesques, ou les pirates mystérieux aux archers séduisants.
Capitaine Blood / De Michael Curtiz / Avec Errol Flynn, Olivia de Havilland, Basil Rathbone / Etats-Unis / 1h59 / 1935.
Les Aventures de Robin des bois / De Michael Curtiz / Avec Errol Flynn, Olivia de Havilland, Basil Rathbone / Etats-Unis / 1h42 / 1938.
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Ma foi, en ce qui me concerne je choisis sans hésiter les deux !
Qu’il soit diamant noir des mers du sud ou renégat verdural des forêts anglaises, à chaque fois le spectacle m’enchante, autant que ses interprètes. Ma pensée va immédiatement à Mme de Haviland qui demeure à ce jour je pense le dernier témoin vivant de cette ère hollywoodien qui me semble bien lointaine ! Une autre va à William Keighley, auteur de quelques scènes de « Robin des Bois » mais rapidement évincé par le dictateur hongrois. Un réalisateur pourtant pas manchot si on en juge par l’excellent « the street with no name », mais sans doute pas taillé pour cette superproduction.
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