Rencontre avec : Henrika Kull

Réalisatrice allemande, Henrika Kull était à Paris à l’occasion de la sortie de son deuxième long-métrage, Seule la joie. Nous avons pu la rencontrer et l’interroger sur cette histoire d’amour atypique entre deux travailleuses du sexe dans une maison close berlinoise.

Le film se déroule dans une maison close. Pourquoi avez-vous été attirée vers ce décor particulier ?

J’ai fait des études de sociologie et, en tant que sociologue, on est toujours intéressé par différents milieux. Ce n’est pas pour éprouver des sensations fortes, mais pour me rapprocher de ces gens, pour leur parler, pour essayer de comprendre un processus de stigmatisation à la fois très élémentaire et très complexe. Mon premier film était un court documentaire sur une maison close et après j’y suis revenue, pendant des années. L’endroit m’intriguait. Je ne cherchais pas à y trouver une histoire, mais quand j’y étais, je me disais que cet endroit devait figurer dans un film.

Comment travaille-t-on avec des acteur.rice.s au milieu d’un décor réel, c’est à dire avec en arrière-plan des non pas des figurants mais des personnes qui font leur travail ?

C’était un premier rôle pour les deux. Katharina, l’actrice de Sascha, avait déjà joué, mais jamais dans un long-métrage. En général, j’aime travailler avec des gens qui n’ont pas beaucoup d’expérience. On travaille ensemble sur la biographie des personnages, on va très loin dans leur histoire personnelle. C’est impossible de tourner de façon normale dans un environnement réel, avec des gens réels et toute une vie qui continue à se dérouler autour de nous. La façon de jouer est spécifique, très différente de ce que l’on trouve généralement dans un film de fiction.

Les corps représentés à l’écran sont différents de ceux que l’on a l’habitude de voir dans un film : Celui de Maria est tatoué, celui de Sascha, âgé par rapport aux standards de beauté de l’industrie. Même ceux des clients sont très variés. Qu’est-ce qui vous a donné envie de filmer ce genre de corps ?

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Seule la joie

Au cinéma le 2 novembre 2022

© Outplay

Un fast-food berlinois. En fond, des discussions inaudibles et des bruits de couverts. Deux femmes sont assises à une table. L’une d’elles, brune, un anneau dans le nez et des tatouages sur les bras, récite un poème.  »Mon mot pour famille n’est pas leur mot pour famille / Mon mot pour poésie n’est pas leur mot pour poésie. / […] Et je suis une femme en ce sens que je suis faite par dépit. » C’est dans ce décor trivial que la poésie est la plus belle, libre de prendre son envol et de sublimer le lieu comme les personnages.

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