On le croyait perdu notre poète des paysages, sauvages ou urbains, errant comme ses personnages, égrenant ça et là quelques documentaires oubliables et fictions peu inspirées, pour ne pas dire ratées. On le retrouve au Japon, notre cinéaste itinérant, admirateur d’Ozu dont il avait suivi les traces en 1985, dans son documentaire Tokyo Ga. Avec un art similaire de l’épure, du cadrage et de la durée, Wenders arpente de nouveau la capitale sous un visage inattendu : celui de ses toilettes publiques.
Dans Les Feuilles mortes, Aki Kaurismäki livre un film d’une grande tendresse sur les rencontres furtives entre deux personnages en quête de tout et de rien. Deux personnages qui se trouvent mais qui ont du mal à ne pas se perdre…
La question de comment filmer l’horreur de l’Holocauste a souvent divisé le monde du cinéma. En prenant une approche radicalement opposée, Jonathan Glazer décide d’en révéler l’horreur sans jamais la montrer, sans même que ses personnages se donnent la peine de la penser. Avec un formalisme à la beauté austère, il retrace la vie mondaine que mènent Rudolf et Hedwig Höss, le commandant du camp d’Auschwitz et sa femme.
Dans The Sweet East, Sean Price Williams nous promène dans une Amérique découpée en différentes idéologies : de punks à islamistes, en passant par néo-nazis et avant-gardistes. Lillian, jeune adolescente désœuvrée, est notre guide à travers ces groupuscules qu’elle intègre, toujours avec un détachement adolescent aussi touchant que frustrant.
Il n’y avait que la provocante Maïwenn, qui aime tant susciter l’ire d’un certain féminisme, pour se pencher sur la destinée de Jeanne du Barry, la plus sulfureuse et dernière favorite du souverain Louis XV. Il fallait aussi Johnny Depp sous la perruque poudrée du « Bien aimé », une plainte pour agression à l’encontre de la cinéaste et une sélection à l’ouverture du festival de Cannes pour achever le tableau par-delà la fiction, l’autoportrait criant d’une artiste ambitieuse et libre qui érige le scandale en principe.
Joyland, c’est ce cabaret au milieu de la ville de Lahore, au Pakistan, un îlot de liberté et de coups bas où les danseuses érotiques se font la guerre pour avoir la meilleure place sur scène. Haider en est loin. Dans sa famille traditionnelle, avec un frère qui travaille, une belle-soeur qui s’occupe de la maison et un patriarche qui surveille l’ensemble, Haider ne semble pas à sa place. Doux, incapable de trancher la gorge d’une bête, c’est lui qui s’occupe des enfants et qui fait la cuisine pendant que sa femme, Mumtaz, travaille.
La tradition cinéphilique française se veut internationaliste, en témoigne la tendance cannoise à récompenser le cinéma de tous horizons. Il y a pourtant des contrées encore peu explorées de notre regard, la Roumanie, bien que détentrice d’une Palme d’or en 2007 pour 4 Mois, 3 semaines, 2 jours de Cristian Mungiu, en est une. Avec Dédales, Bogdan George Apetri nous propose un thriller baigné d’une certaine clairvoyance dans sa critique sociale.
Les journalistes sur place l’ont assez répété : malgré une compétition de bon niveau cette année, aucun film ne s’est réellement détaché dans la course à la Palme. Pas vraiment de chef d’œuvre donc, ni de palme évidente au rendez-vous, mais de belles émotions tout de même et de l’incompréhension, aussi, suite à l’annonce du palmarès qui ne nous a pas pleinement satisfaits. Contrairement à une grande partie de la presse, ce n’est pas devant Sans filtre (Triangle of Sadness) et sa palme d’or que l’on s’est étranglé. On a même beaucoup jubilé devant cette nouvelle satire de Ruben Östlund où un couple de mannequins-influenceurs en croisière sur un yacht voit son luxe propret et confortable voler en éclats. Sur le bateau, tout déborde, tout explose dans un chaos où l’on vomit et où l’on fait vomir le capitalisme. Il est par ailleurs assez ironique que le festival ait choisi de récompenser un film qui en reflète certains de ses aspects, tels que le culte des apparences et les différences de classe. En somme, peut-être est-ce moins le cynisme du film qui dérange ses détracteurs que le miroir qu’il tend à nos viles hypocrisies.
Après les événements du 11 septembre, le gouvernement américain cherche à désigner des fautifs. À tout prix. Mohamedou Ould Slahi (Tahar Rahim) devient alors le bouc émissaire de cette tragédie. Sans preuve, inculpation, procès ou jugement, il est retenu à Guantanamo.