Dans Les Feuilles mortes, Aki Kaurismäki livre un film d’une grande tendresse sur les rencontres furtives entre deux personnages en quête de tout et de rien. Deux personnages qui se trouvent mais qui ont du mal à ne pas se perdre…
La vie de Holappa est morne, celle de Ansa tout aussi maussade. Ils se croisent déjà par des regards, aucun jeu de séduction n’a lieu, seulement la découverte d’une complicité, d’une vulnérabilité partagée. Kaurismäki réalise une comédie musicale sans mouvement physique : la musique énonce ce que les personnages n’arrivent à dire et leurs pupilles dansent ensemble.
« C’est une chanson qui nous ressemble
Toi tu m’aimais, et je t’aimais
Nous vivions tous les deux ensemble
Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais »
Le réalisateur parvient grâce à un sens du cadre affuté et un rythme pondéré à mêler mélancolie et fantaisie, à éclairer délicatement la grisaille urbaine et à chanter un hymne à l’amour en temps de guerre. Il y évoque le cinéma comme un abri et fait de son film un refuge. Quiproquos, occasions manquées et accidents ne peuvent jamais entraver le destin filmique. Si les personnages sont voués à s’aimer, la réalité n’aura aucun impact sur leurs trajectoires. Il met en scène la naissance de la volonté, ses combats et ses blessures. Mais chez Kaurismäki, on reçoit une défaite et une victoire avec la même humilité.
Le réalisateur use avec intelligence de ses ressorts tragiques et comiques. Il nous guide à travers l’éclosion sentimentale de ces personnages, quasi mutiques et pourtant tellement expressifs. Les Feuilles mortes est un film à la sensibilité précieuse. Une œuvre sur les âmes-sœurs de cinéma : Holappa et Ansa, un spectateur et un film.
Les Feuilles mortes / De Aki Kaurismäki / Avec Alma Pöysti et Jussi Vatanen / Finlande / 1h20 / Festival de Cannes 2023 – Compétition officielle
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