« Sweet dreams are made of this, everybody’s looking for something ». Les personnages de Kinds of Kindness sont tous en quête de quelque chose. Pour répondre à leurs désirs, leurs proches doivent faire preuve de gentillesse. Une gentillesse servile, totale.
Fervent scrutateur de nos mesquines turpitudes, Lánthimos semblait avoir trouvé dans La Favorite un nouveau ton, en plus d’une nouvelle muse, en conciliant son cynisme corrosif avec une écriture plus policée, susceptible de toucher un plus large public. Vilenies du pouvoir, de l’amour et du désir, qui vont souvent de pair, s’y répondaient dans un réjouissant jeu de massacre, amoral et judicieusement déroutant. En reconduisant Emma Stone, au milieu d’autres stars, dans son univers dérangé, Pauvres créatures arbore une nouvelle promesse de spectacle et de plaisir tenue haut la main – c’est le moins qu’on puisse dire – mais hélas aux dépens d’un vrai trouble, d’une puissance transgressive.
La disparition du rédacteur en chef d’un journal américain basé en France donne l’occasion de plonger à l’intérieur des histoires qui formeront une ultime publication. La mise en scène de Wes Anderson se radicalise à travers une créativité formelle visant l’excès. Un film d’obsessionnel pour obsessionnels.
Préparer une rencontre avec Abel Ferrara est un exercice en soi. D’abord parce qu’il est connu pour être difficile à interviewer (« Publier une interview en bonne et due forme d’Abel Ferrara relève de l’impossible ou du prix Pulitzer » dixit Frédéric Bonnaud dans lesInrocks). Ensuite, parce que passer trente minutes avec un pilier du cinéma américain, ça n’arrive pas tous les jours. Le rendez-vous était pris dans un café du 9e arrondissement de Paris, en début d’après-midi, pour parler de son nouveau film Tommaso, long-métrage très autobiographique qui fait le portrait d’un artiste torturé incarné par Willem Dafoe. Entouré de Cristina Chiriac, son épouse qui joue l’autre rôle principal, et de leur fille de cinq ans Anna Ferrara, également dans le film, c’est un homme apaisé que nous avons rencontré, différent de la légende que l’on fabrique encore autour de sa personnalité.
[Alors que l’entretien commence, Abel Ferrara est sorti du bar, Cristina Chiriac prend place]
Avant la première projection du film à Cannes l’année dernière, vous aviez dit « n’ayez pas trop d’attentes » ! C’était une entrée en matière surprenante.
Cristina Chiriac : C’est vrai ! Je pense que ne pas avoir d’attentes avant de regarder un film est la meilleure façon de le découvrir.
Le personnage que vous incarnez dans Tommaso semble très proche de vous. L’avez-vous abordé en terme de composition ?
CC : Non, j’étais totalement moi-même. Il y a bien sûr des limites que l’on ne peut pas franchir, mais j’ai essayé d’être la plus vraie et naturelle possible. Abel dirige ses acteurs, mais chacun peut développer sa propre vision. Tout le monde a sa propre manière de percevoir l’art. Je n’ai pas pris le tournage comme un travail, mon rôle faisait partie de moi-même. C’est ce que j’ai appris en faisant Tommaso.
Christopher Walken a raconté que les tournages d’Abel Ferrara étaient chaotiques. Êtes-vous d’accord avec lui ?
Les personnages atteints de troubles mentaux correspondent à la majeure partie de la filmographie d’Edward Norton (Peur primale, Fight Club, American History X, L’incroyable Hulk, etc…). Il n’est donc pas étonnant de le voir endosser avec une facilité flagrante le rôle de Lionel Essrog, le protagoniste du roman Motherless Brooklyn de Jonathan Lethem. Personnage at dans le film, Edward Norton semble aussi l’être sur le plateau, endossant les rôles d’acteur, scénariste, réalisateur et producteur pour s’attaquer au genre très prisé du film noir.